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Écoconception : Une démarche engageante avec de réels bénéfices

Écoconception : Une démarche engageante avec de réels bénéfices

Se lancer dans une démarche d’écoconception est parfois un processus complexe, long et coûteux. Mais les bénéfices peuvent être très importants, en matière d’économies d’énergie, d’impacts sur l’environnement ou encore de motivation des salariés.

Réduire la quantité de film plastique autour d’une bouteille, remplacer un matériau par un autre pour que le pack soit recyclable… Ces exemples en matière d’écoconception sont peut-être les plus connus, mais cette démarche ne se résume pas à un simple travail sur l’emballage. « L’écoconception est une démarche qui améliore les performances  environnementales d’un produit ou d’un service. Elle a pour but de diminuer les impacts environnementaux tout au long de leur cycle de vie, de l’amont jusqu’à la gestion des déchets », définit Delphine Gomes da Rosa. Cette ingénieure innovation est en charge du sujet de l’écoconception au sein du pôle de compétitivité Vitagora, basé à Dijon, qui fédère plus de 650 membres.

Dans ce secteur, des leviers sont actionnables sur les grandes étapes de la vie d’un produit : la production agricole (type d’agriculture), la formulation (ingrédients utilisés), le process de transformation (consommation d’énergie), le transport et la logistique (camions optimisés), les emballages (recyclés), l’utilisation par le consommateur (type de cuisson) et enfin la valorisation ou la fin de vie (recyclage, compostage).

C’est souvent la production agricole qui engendre le plus grand impact environnemental : c’est ce que montrent les résultats de l’application gratuite Agribalyse de l’Ademe (agribalyse.ademe.fr). Cette base de données est construite à partir de la méthodologie des analyses du cycle de vie (ACV). Cette méthode normalisée quantifie les impacts d’un produit sur l’environnement, tout au long de son cycle de vie, selon plusieurs indicateurs portant sur la qualité de l’air et de l’eau, l’épuisement des ressources et la santé humaine. L’ACV est en cela un outil de l’écoconception.

Un diagnostic environnemental

Étant donné la complexité de cette démarche, les entreprises alimentaires ont tout intérêt à se faire accompagner. Des structures comme Vitagora ou le Critt agroalimentaire PACA, qui est référent technique des entreprises agroalimentaires de cette région, sensibilisent les industries sur ce sujet et peuvent les mettre en relation avec des spécialistes ou réaliser des ACV, pour chiffrer précisément les données concernant l’entreprise.

Cependant, réaliser un tel diagnostic peut représenter un budget conséquent pour une société. Heureusement, des aides et des financements existent, comme le programme Green Go de l’Ademe pour améliorer la qualité environnementale des produits alimentaires, les aides VTE vert pour recruter des jeunes sur des missions en lien avec la transition écologique et énergétique ou encore les aides Tremplin pour la transition écologique des PME.

Des équipes pluridisciplinaires

Outre l’aspect économique, mettre en oeuvre une démarche d’écoconception peut prendre du temps (parfois au moins un an) et requiert l’engagement des parties prenantes dans l’entreprise. « Il faut l’aval de la direction. Le projet touche beaucoup de services : les achats, la qualité, la R&D, le service commercial, la production… Il faut donc construire des équipes pluridisciplinaires », souligne Delphine Gomes da Rosa.

D’un point de vue technique, écoconcevoir un produit n’est par ailleurs pas simple. « Il faut mettre en exergue tous les indicateurs pour voir ce qui est le plus pertinent. C’est difficile de tous les réduire », explique Estelle Marin, experte en RSE et écoconception des emballages au sein du Critt agro alimentaire PACA. « Il faut faire attention à ne pas faire de transferts d’impact, ajoute l’ingénieure de Vitagora. Par exemple, si l’on veut diminuer le poids d’un emballage carton contenant des sachets de biscuits, il faut faire des essais et prendre en compte la globalité du produit. S’il est moins protégé, le biscuit va tendre à plus se casser, ce qui va occasionner plus de pertes et aussi un impact négatif au niveau du consommateur. »

Des idées préconçues

Tout au long de la vie d’un produit alimentaire, l’entreprise doit être en effet en mesure de garantir, entre autres, ses qualités sanitaires, organoleptiques et l’information présente sur le packaging. « Les encres végétales peuvent être une alternative, mais elles doivent tenir au froid et à l’humidité », illustre ainsi Estelle Marin. En matière d’écoconception, elle évoque aussi certaines idées préconçues : « Le local, d’un point de vue strictement “impact environnemental”, est parfois moins bon qu’un approvisionnement hors Europe, mais plusieurs facteurs doivent être étudiés afin de décider de la stratégie la plus vertueuse. »

Si un travail d’écoconception peut paraître exigeant, il peut toutefois offrir de réels bénéfices. Delphine Gomes da Rosa liste de nombreux avantages : diminuer bien sûr son impact environnemental, mais aussi ses coûts de production liés aux économies d’énergie par exemple, se différencier de la concurrence, répondre aux attentes des consommateurs, fédérer des équipes autour d’un projet porteur de sens et anticiper la réglementation (comme le décret 3R, pour réduire, réutiliser, recycler).

Une prise de conscience

Sur ce dernier point, Estelle Marin constate hélas que les entreprises agroalimentaires en PACA – à 70 % des TPE – sont davantage préoccupées par la mise en conformité réglementaire de leurs activités et produits. Dans ce contexte, les formations collectives organisées sur le sujet de l’écoconception ne rencontrent pas le succès attendu. Depuis deux ou trois ans, l’experte observe néanmoins une prise de conscience. « Des entreprises qui s’engagent dans la responsabilité sociétale des entreprises s’intéressent davantage à l’écoconception, mais pas forcément de façon formalisée ou structurée », indique-t-elle.

Au sein de Vitagora, bien que l’action « écoconception » attire les adhérents, ce sont principalement les groupes ou les entreprises de taille intermédiaire qui se lancent dans ces projets d’envergure. Certaines PME mettent bien en place des projets d’écoconception, mais davantage sur une partie du cycle de vie des produits.

Pour toutes les entreprises qui se posent des questions à ce sujet, des outils gratuits d’autodiagnostic peuvent être un premier pas. Il existe plus particulièrement le Climatomètre de Bpifrance pour mesurer l’impact de son activité sur l’environnement et le logiciel Bee de Citeo pour réaliser un bilan environnemental de ses emballages.

— Caroline EVEN (Tribune Verte 2999)

Expérimentation : L’IMPACT ENVIRONNEMENTAL DES PRODUITS ALIMENTAIRES CLAIREMENT AFFICHÉ

Dans le cadre de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, une expérimentation sur l’affichage environnemental des produits alimentaires a été lancée. Entre 2020 et 2021, plusieurs acteurs volontaires ont présenté dix-huit projets. Parmi les dispositifs les plus connus se trouvent le planet-score et l’eco-score. Ils se basent en partie sur l’ACV (avec les données d’Agribalyse®), en y ajoutant notamment des critères liés à la biodiversité. À l’heure actuelle, aucun schéma n’a encore été retenu.