"Etre une femme est plutôt un atout"

"Etre une femme est plutôt un atout"

Catherine Siri-Racle - Directrice de la SAS Bresson est l’une des rares femmes à la tête d’un négoce agricole en France. Elle nous en dit davantage sur ses responsabilités et sur ses fonctions.

Catherine Siri-Racle dirige depuis 2000 la SAS Bresson, entreprise familiale spécialisée dans la collecte de céréales et d’oléoprotéagineux implantée à Saulon-la-Chapelle, en Côte-d’Or. Elle est l’une des rares femmes en France à la tête d’un négoce agricole : « Au départ, je ne voulais pas exercer ce métier, que je trouvais trop prenant. J’ai commencé à travailler dans le tourisme, mais j’ai été déçue. J’ai ensuite intégré l’entreprise familiale en tant que secrétaire, en 1984, puis j’ai fait une formation en comptabilité et ai repris cette activité. Je me suis formée au fur et à mesure, et j’ai repris les rênes de l’entreprise en 2000, au départ en retraite de mes parents », explique-t-elle. L’entreprise – qui a fêté ses cent ans cette année – collecte entre 140 000 à 150 000 tonnes de céréales et d’oléoprotéagineux auprès de 500 clients agriculteurs. « Nous avons une activité de collecte et de stockage, avec onze sites de réception pendant les moissons, et une capacité de stockage de 95 000 tonnes. Nous nous sommes orientés très tôt sur les filières de qualité, et plus de 50 % des productions collectées sont ainsi sous contrat : blé CRC, lin Bleu-Blanc-Coeur, soja tracé pour la filière Sojasun, moutarde de Bourgogne… Ce qui implique des contraintes de production, de traçabilité et de stockage particulières. Depuis cette année, nous avons également commencé à collecter du bio », précise-t-elle.

Si vous avez la motivation, allez-y !

Chaque jour, son travail est différent : elle gère plus particulièrement les contrats de vente des agriculteurs, le personnel… Ainsi que tous les problèmes qui peuvent surgir dans la vie d’une entreprise. « Dans une structure à taille humaine comme la nôtre, un chef d’entreprise doit être polyvalent. Pendant les moissons, il m’arrive d’être à la bascule pour peser les remorques qui arrivent au silo », sourit-elle.

En France, seule une dizaine de femmes sont à la tête d’un négoce agricole, et seulement deux d’entre elles le sont en Bourgogne. Les clients agriculteurs de la zone de collecte de l’entreprise sont majoritairement des hommes. « Au début de mon activité, j’étais souvent la seule femme dans les réunions, et c’était plutôt impressionnant. Mais mis à part cet ‘‘isolement’’, être une femme est plutôt un atout dans le milieu agricole. Nous apportons notre différence, notre façon de voir, notre sensibilité… J’ai peut-être dû davantage prouver mes compétences que l’aurait fait un homme à ma place, mais une fois cette étape passée, je n’ai eu aucun problème. Ma génération a été l’une des premières à accéder à des responsabilités. Aujourd’hui, les choses évoluent. Que ce soit lors d’une transmission ou lors d’un recrutement, le principal frein pour les femmes, c’est notre manque de confiance en soi. Nous nous posons plus de questions que les hommes. Souvent, une jeune femme va hésiter à postuler pour un emploi si elle ne correspond pas à 200 % au profil, alors qu’aujourd’hui, il est très simple de compléter ses compétences par une formation ou de se former en interne. Mon conseil est donc le suivant : si vous avez la motivation, quel que soit le poste, allez-y ! » Son entreprise compte huit femmes sur 35 collaborateurs. « Elles sont toutes au bureau. Pourtant, je rêverais d’avoir une femme dans mon équipe de chauffeurs, mais je n’ai jamais eu de candidates ! »

—— Emmanuelle THOMAS (Tribune Verte 2953)