La Bretagne préserve toute sa vitalité

La Bretagne préserve toute sa vitalité

Face aux défis que doit relever la Bretagne, le renouvellement des générations au sein des exploitations ouvre de nouvelles opportunités. Ces dernières devraient être confortées par des investissements liés à la relance économique et à la transition écologique.

Comment caractériseriez-vous aujourd’hui la filière agricole et agroalimentaire de la Bretagne ?
Pascale Gelin : La Bretagne s’est développée après-guerre au prix de beaucoup de travail et d’efforts. Elle est donc devenue une grande région agricole spécialisée en élevage (lait, porcs et volailles) et qui compte un nombre important d’actifs aussi bien en production qu’en amont et en aval de la filière. Il se dégage encore aujourd’hui cette énergie de l’adversité et de vitalité transmise par les aînés.

Quel est, selon vous, le plus grand défi à relever pour les années à venir ?
P. G : Il n’est pas toujours forcément évoqué, mais le plus grand challenge pour la Bretagne est démographique. Cette fragilité structurelle se traduit par un manque de renouvellement des générations au sein des exploitations. Aujourd’hui, 52 % des cédants sont concernés par un départ en retraite dans les dix ans. Cela nécessite de travailler et d’innover sur la transmission pour réussir ce renouvellement.

Comment inciter les jeunes à investir dans l’agriculture ?
P. G : Dans une région où l’image du modèle agricole a été bousculée, réduite souvent à une agriculture intensive, il est nécessaire de communiquer sur la diversité des métiers et sur leurs profils. Le challenge est d’accueillir les personnes qui ont acquis un savoir-faire dans d’autres filières ou dans des secteurs d’activité différents. Ce ne sont pas des situations anecdotiques. Au contraire, c’est un mouvement de fond ! Cela nécessite que les futurs cédants soient sensibilisés et formés. L’installation d’exploitants orientés vers les circuits courts ne doit pas non plus couper ces derniers des autres agriculteurs aux modes de production différents. Très encourageants, des privés investissent dans le foncier pour aider certains jeunes à s’installer.

Quels sont les autres challenges à relever ?
P. G : Les nombreuses et récentes crises mettent en exergue la nécessité de moderniser les exploitations, d’améliorer la qualité au travail et de gagner en compétitivité. La robotisation ainsi que le développement de nouvelles technologies devraient y contribuer et attirer une nouvelle génération d’exploitants, ce qui permettrait de résoudre en partie les problèmes démographiques déjà signalés. Nous espérons que ces investissements pourront avoir lieu grâce au plan de relance économique prévu par le Gouvernement. Par ailleurs, l’environnement et l’écologie restent des sujets de débats très prégnants en Bretagne. La crainte est de devoir choisir entre la relance économique et la transition écologique. Nos élus souhaitent que ces deux challenges soient traités en même temps. L’agriculture réussirait ainsi à prendre le virage nécessaire à sa durabilité au rythme où les exploitants sont capables de le faire.

La transition énergétique figure-t-elle également au débat ?
P. G : Environ 130 méthaniseurs sont installés ou sont en cours d’installation en Bretagne, faisant de la région – avec le Grand-Est – l’une des premières à se lancer dans ce domaine. Le phénomène s’est accéléré ces deux dernières années avec l’arrivée de méthaniseurs de grande capacité, mais ces derniers sont contestés par certains citoyens. Sur l’exploitation, cela correspond à une nouvelle forme de revenu.

Et qu’en est-il du sujet de l’autonomie alimentaire ?
P. G : Les questions liées aux débouchés interpellent de plus en plus les exploitants, même non transformateurs. La Bretagne a certainement un rôle à jouer dans le développement des cultures végétales qui apportent plus d’autonomie protéinique à la fois pour les animaux et pour les humains. En dehors du mouvement végan, la tendance est de manger moins de viande. À terme, le paysage des productions végétales pourrait bien changer.

—— Propos recueillis par Marie-Dominique GUIHARD (Tribune Verte 2945)