L’agriculture biologique : une place prépondérante dans l’enseignement agricole

L’agriculture biologique : une place prépondérante dans l’enseignement agricole

Partenaire de la formation des futurs agriculteurs, l’enseignement agricole s’implique pleinement pour la prise en compte de l’agriculture biologique tant dans ses cursus de formation que dans ses exploitations, qui sont utilisées comme support pédagogique aux apprenants.

Présente dans l’enseignement agricole depuis 1985 − date de création de deux certificats de spécialisation et d’un module en brevet de technicien agricole − l’agriculture biologique est prise en compte dans tous les cursus de formation de l’enseignement agricole depuis la rentrée 2008.

Différentes notes de service (de 2011 et 2017) ont ensuite décliné la prise en compte de l’agriculture biologique dans l’enseignement agricole en conformité avec le plan « Agriculture biologique : horizon 2012 » et le programme « Ambition bio 2017 ». « Elles ont imposé que les lycées agricoles publics aient une exploitation convertie au bio ou un atelier bio au sein de leur exploitation », indique Jean-Marie Morin, animateur du réseau Formabio. En parallèle, depuis septembre 2008, une approche renforcée du mode de production « agriculture biologique » permet aux centres de formation qui en font la demande d’obtenir une habilitation « orientation  agriculture biologique » pour certaines formations. « Il existe plusieurs façons de faire de l’agriculture. Le choix du mode de production biologique répond à des attentes sociétales en matière d’environnement, de qualité et de sécurité alimentaire, de respect du bienêtre animal. L’enseignement agricole doit pouvoir répondre à cette demande et préparer les futurs agriculteurs à intégrer cette possibilité dans leurs choix professionnels », souligne Jean-Marie Morin.

Une pluralité de formations

Ainsi, l’offre de formations dans le domaine de l’agriculture s’est largement étoffée, pour atteindre, en 2018, une centaine de formations habilitées « à orientation AB » et spécialisées en AB, du CAPA à la licence pro, proposées par près de 100  établissements en majorité publics. « 51 % de ces formations sont des BPREA (brevet professionnel responsable d’exploitation agricole), en formation adultes notamment », indique Jean-Marie Morin.

Selon Formabio, au 1er janvier 2018, 64,1 % des exploitations de  l’enseignement agricole public conduisent des surfaces selon le cahier des charges de l’agriculture biologique (certification obtenue ou en conversion). 25 sites d’exploitation sont entièrement convertis ou en conversion pour la partie pleine terre. « Cela représente 22,3 % des surfaces de la ferme ‘‘Enseignement agricole public’’ ». Dans les exploitations des établissements publics d’enseignement et de formation professionnelle agricoles (EPLEFPA), le nombre d’ateliers conduits en bio s’élève à 45 en maraîchage, 38 en grandes cultures, 33 en ruminants, 31 en fruits, 20 en viticulture et 11 en porcs et volailles.

« L’EXPLOITATION, UN VECTEUR POUR MONTRER L’INTÉRÊT DE L’AB »
Pauline Herbemont, directrice de l’exploitation agricole de l’EPL d’Aurillac (Cantal)

« L’exploitation agricole de l’EPL d’Aurillac sera conduite en totalité en agriculture biologique dès octobre 2018. Elle compte 175 ha de SAU (méteil, luzerne, herbe) et deux troupeaux : 50 vaches de race prim’holstein qui produisent 300 000 litres de lait (50 % transformés sur place en fromage salers et cantal, 50 % livrés à la laiterie Sodiaal) ainsi qu’un troupeau allaitant de race salers (45 mères et une vingtaine de broutards). L’exploitation est un véritable support de pédagogie et occupe une position centrale dans l’EPL. Tous les élèves de l’établissement (400 au total) y passent plusieurs jours par an, en présence des salariés, pour les « services de ferme », c’est-à-dire l’aide à la traite, l’alimentation des animaux (c’est notamment le cas des élèves de seconde pro en bac CGEA), l’aide à la gestion du troupeau (première année de BTS ACSE), ainsi que pour les travaux pratiques : le dressage des génisses, le déplacement du troupeau, la zootechnie, la conduite du tracteur (première pro, terminale pro et BTS). Avec le passage à l’agriculture biologique, la ferme pourra proposer des situations pédagogiques d’apprentissage adaptées et sera un vecteur pour montrer aux élèves l’intérêt des techniques alternatives et leur faisabilité grandeur nature, ainsi que l’impact technico-économique du mode de production bio. L’équipe pédagogique et les salariés de l’exploitation ont d’ores et déjà été formés aux techniques utilisées en AB (désherbage mécanique, observation des animaux, éthologie…). L’exploitation en bio pourra être un tremplin pour susciter des vocations parmi les futurs agriculteurs en formation. »

« UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE L’AGRONOMIE »
Gilles Parcoret, formateur en AB à la MFR Inéopole de Brens (Tarn)

« La MFR Inéopole a démarré les premières formations bio en 1987 avec des parcours destinés à l’installation en agriculture (BPA et BPREA). Depuis, nous avons développé notre offre de formations (certificat de spécialisation en AB, licence pro ABCD) avec des partenaires1 et grâce à la création du réseau Formabio. L’approche bio change beaucoup plus de choses dans l’enseignement qu’on ne le pense, à commencer par la prise en compte de l’agronomie. Le travail du sol, la vie microbiologique du sol… reprennent une vraie place dans la formation en AB. Maintenir ou développer une bonne fertilité du sol est le premier concept de l’agriculture biologique. L’enseignement a ainsi évolué vers une réflexion plus complexe de la conduite des cultures, des rotations, de l’environnement. La réflexion sur l’autonomie alimentaire des exploitations d’élevage et le bilan énergétique des exploitations sont également beaucoup plus largement pris en compte. L’AB donne l’impression d’un essor rapide, une vraie satisfaction pour moi qui ai oeuvré toute ma carrière pour le développement de ce mode de production. J’espère que l’AB deviendra le standard de l’agriculture ! Mais des choses doivent encore évoluer, comme les modalités de transformation et de distribution des produits. Actuellement, 50 % de la production bio passe par la grande distribution, circuit qui doit à mon avis réformer ses pratiques. À tous les niveaux de la filière AB (production, formation…), des besoins en nouvelles compétences existent. Et surtout, au-delà des compétences, les acteurs de la filière doivent être le plus ouvert possible, sur des approches innovantes. L’AB continuera d’exister si elle innove dans ses pratiques, dans la transformation des produits. L’innovation sera le moteur du développement de la bio. Selon moi, la prise en compte de la bio est forcément amenée à progresser encore dans l’enseignement agricole. »
1 CFPPA de Saint-Affrique (12) et le réseau d’établissements proposant la licence pro ABCD


« L’AGRICULTURE BIO EST PRÉSENTE EN PARTIE DANS TOUTES LES FORMATIONS »
Caroline Galvani, adjointe de direction au CFA/CFPPA Brioude -Bonnefont (Haute-Loire)

« Notre établissement propose des offres de formation à orientation biologique afin d’être en conformité avec les référentiels de formation nationaux. Notre territoire permet ces types de production. L’agriculture bio est présente en partie dans toutes les formations mais spécifiquement en licence ABCD (agriculture biologique conseil et développement), dans des modules d’initiative locale agriculture biologique en BTS, en brevet professionnel (formation adultes) à orientation maraîchage bio, en unité capitalisable d’adaptation régionale à l’emploi (soins aux animaux par les méthodes alternatives…). L’exploitation de l’établissement est en agriculture bio depuis environ 25 ans. Elle assure une production d’ovins viande bio de race bizet et de poulets de chair vendus sous le label ‘‘poulet bio de l’Ardèche’’. Notre exploitation a bien sûr un rôle de production, mais aussi de support pédagogique pour nos apprenants. Elle assure également les rôles d’expérimentation et de démonstration.
Notre équipe pédagogique participe aux formations proposées par FORMCO, a accès à la conférence en agro-écologie et participe activement aux journées techniques en lien avec la chambre d’agriculture et Haute-Loire bio. »