Les Crudettes : de l'aéroponie pour les salades

Les Crudettes : de l'aéroponie pour les salades

Grâce à sa nouvelle serre R & D high-tech, l’entreprise Les Crudettes, spécialiste des salades de quatrième gamme, teste la culture en aéroponie. Objectif : proposer une solution pour produire localement des salades et des herbes aromatiques toute l’année, dans un environnement entièrement contrôlé.

Si l’hydroponie est de plus en plus connue, l’aéroponie reste un mystère pour beaucoup. Ce concept vise à cultiver des légumes en « brumisant » leurs racines avec une solution aqueuse nutritive. « Avec le système d’hydroponie, répandu en production de fraises et de tomates, les salades flétrissent, explique Arnaud Chausson, responsable de projets industriels chez Les Crudettes, lors d’une visite à la presse organisée le 6 octobre par Dev’Up1. Nous avons donc construit, avec la la start-up suisse CombaGroup, une serre R & D afin de valider la production de salades et d’herbes aromatiques en aéroponie. »

Le projet Cap Vert

Pour la filiale du groupe LSDH2, fondée il y a 35 ans, l’enjeu est de taille : assurer son approvisionnement local et continu en salades et en herbes aromatiques fraîches. Actuellement, les salades viennent d’Espagne ou d’Italie en période hivernale, et les herbes aromatiques sont importées au-delà de l’Europe, avec un coût élevé et un impact carbone non négligeable. La problématique main-d’oeuvre est aussi un frein au niveau national, avec des producteurs de salades en pleine terre qui peinent à recruter des cueilleurs, pour des questions de pénibilité. C’est ainsi que le deuxième producteur français de salades prêtes à consommer (25 % de parts de marché), avec plus de 450 références vendues en marque propre ou distributeurs, a développé le projet nommé « Cap Vert ». Cette serre innovante de 4 000 m², située à Châteauneuf-sur-Loire, jouxtant l’usine de production, teste l’aéroponie mobile automatisé depuis trois ans. L’investissement de six millions d’euros (1 M€ de soutiens européens Feader) doit permettre d’assurer la pertinence technique et économique du système de production, avant de pouvoir le proposer à des producteurs partenaires mais aussi au-delà. Et les premiers retours semblent très positifs, d’après les responsables : « En pleine terre, vous avez un à trois cycles par an, contre huit cycles ici. La part de déchets est très faible dans la serre fermée. Le délai entre la récolte et l’ensachage, qui pouvait atteindre cinq jours, est réduit à quelques heures seulement, et le bilan carbone est bien meilleur ! L’aéroponie permet aussi une économie d’eau avoisinant les 90 % . Et grâce à la maîtrise de l’atmosphère et à l’absence d’insectes, nous pouvons produire des légumes sans produits phytosanitaires », liste Arnaud Chausson. Du semis dans des petits cubes de mousse au passage sur des tables de culture au-dessus de bacs où est « brumisé » régulièrement un brouillard nutritif, jusqu’à la découpe finale des plants, tout est mesuré. « Pour gagner encore en productivité, nous avons incliné les tables de culture, et nous continuons de travailler sur d’autres solutions, comme des espacements dynamiques pour augmenter les distances entre les salades en fonction de leur croissance », détaille le responsable de projets industriels. « Des tests organoleptiques n’ont montré aucune différence entre une salade hors sol et une de pleine terre », avancent les responsables de l’entreprise, qui imaginent un prix de vente potentiellement supérieur pour ces salades produites « sans pesticides », mais non bio car sans lien au sol. « L’enjeu est de construire quelques dizaines d’hectares de serre en aéroponie d’ici cinq à dix ans afin d’assurer une bonne partie de l’approvisionnement de notre usine, qui consomme 75 tonnes de salades par jour », indique Thierry Dubois, directeur de l’entreprise Les Crudettes. Une serre de 8 000 m² doit d’ailleurs sortir de terre en 2021 pour la production de menthe, de basilic et autres herbes aromatiques fraîches.

—— Olivier LÉVÊQUE (Tribune Verte 2948)
(1) Agence de développement économique située dans le Centre-Val de Loire.
(2) Laiterie de Saint-Denis-de-l’Hôtel.