Vendredi : Changer le monde sans changer de travail

Vendredi : Changer le monde sans changer de travail

Grâce à la plateforme Vendredi, des salariés peuvent s’investir dans la vie associative sur leur temps de travail. Créée pour servir de lien entre les entreprises et les associations, cette startup a un objectif : permettre aux salariés de ne pas choisir entre travailler et s’investir dans une activité citoyenne. Pour Félix de Monts, qui a cofondé Vendredi avec Julian Guérin, cette initiative aide les entreprises dans leur démarche RSE.

Pourquoi avez-vous créé Vendredi ?
Félix de Monts : Vendredi est une start-up sociale. Elle a été créée pour donner la possibilité à des salariés de dédier du temps de travail à la concrétisation des dix-sept objectifs du développement durable. Se former, accueillir un stagiaire, offrir ses compétences, présenter son métier, apporter son aide… Les possibilités sont nombreuses. Nous proposons aux entreprises d’autoriser leurs salariés à travailler pour une association sur leur temps de travail. Pour cela, nous nous employons à convaincre les entreprises de leur intérêt à favoriser cette démarche. Nous faisons le lien entre elles et les associations en recherche de bénévoles. Nous créons un cadre qui favorise la concrétisation de cette intention. Nos 50 salariés sont des experts de la RSE. Grâce à eux, nous proposons aux entreprises un éventail de prestations : des ateliers de sensibilisation, des outils de communication, une mise en relation avec les bons partenaires. Dans le même temps, nous créons un espace pour que les salariés comprennent ce que fait leur entreprise  et nous les invitons à faire des propositions d’action. Nous encourageons l’engagement dans des moments clés de l’année : Semaine du développement durable, Octobre rose, mois des Fiertés… À l’autre bout de la chaîne, nous venons en aide aux associations bénéficiaires, en organisant des collectes, du mentorat, etc.

D’où est venue cette idée ?
F. d. M. : Elle est née progressivement, lorsque j’étais étudiant à Science Po et pendant mes stages. Elle est aussi en rapport avec mes intérêts personnels. Je trouvais absurde de devoir choisir entre le privé et l’associatif. Cela crée une fracture entre le salarié et le citoyen ; or, je suis les deux à la fois et je voulais faire les deux à la fois. J’ai donc créé un moyen de concilier activité professionnelle et engagement, qui permette aux autres de le faire également. Julian Guérin et moi avons commencé à y réfléchir sérieusement en 2014. En 2015, nous avons créé une association, qui a été transformée en start-up en 2018. Depuis 2020, la plateforme existe en tant qu’outil de mise en relation et de facilitation.

Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?
F. d. M. : Le plus difficile au début était que les entreprises n’étaient pas assez matures. Payer leurs salariés pendant qu’ils travaillent pour quelqu’un d’autre était difficile à entendre. Nous avons déployé des arguments en rapport avec la cohésion des équipes et avec le besoin de trouver du sens dans son travail. Nous avons expliqué que cette démarche entrait dans le cadre de la RSE et qu’elle leur permettait d’engager une transition sociale et environnementale.

Quels sont vos objectifs pour la suite ?
F. d. M. : Aujourd’hui, même si nous travaillons avec 220 entreprises et 2 000 associations, cela reste une démarche marginale. Or, 80 % des entreprises veulent améliorer leur impact, mais seulement 10 % d’entre elles estiment qu’elles en font assez. Il y a un énorme potentiel. Pour le moment, l’essentiel des actions concerne plutôt des demi-journées ponctuelles, une ou quelques fois par an. Pourquoi ne pas envisager des missions plus longues ? Ou même de passer la dernière année de sa carrière à moitié dans son entreprise et à moitié dans une association, comme une année de transition ? En 2022, notre chiffre d’affaires a atteint deux millions d’euros. Nous espérons atteindre trois, voire quatre millions en 2023. Quant aux personnes que nous avons aidées, elles sont déjà 50 000. En 2023, notre ambition est de le faire avec 100 000 d’entre elles.

— Propos recueillis par Emmanuelle BORDON (Tribune Verte 3012)