A chaque étape, son financement privé

A chaque étape, son financement privé

Il existe une multitude de financements, notamment privés, mise à la disposition des entrepreneurs. Le plus souvent, ils s’adaptent à l’âge de l’entreprise. Tour d’horizon.

Pour créer ou développer son entreprise, le financement privé apporte de belles opportunités. Dans un domaine qui peut s’avérer complexe, nous nous appuyons sur le travail de Liselore Martin, de Végépolys, qui a réalisé une cartographie des possibles en 2017-2018 afin de donner des pistes en lien avec le cycle de vie de l’entreprise. Start-up, ETI, PME, grandes entreprises… les besoins en levée de fonds sont en effet différents (voir l’encadré page 12). À sa création, l’entreprise a réalisé quelques prototypes en s’appuyant sur de la recherche et développement. Ces charges variables sont faibles. Les acteurs des levées de fonds s’intéressent à ces start-up par leur potentiel à la scalabilité, la capacité à se développer à une échelle industrielle. À ce stade, une subvention (pas de prise au capital, pas d’intérêt) est souvent octroyée à travers les concours. La pratique du bootstrapping, c’est-à-dire le financement sur des fonds propres limités (indemnités chômage, par exemple) sans faire appel à des investisseurs extérieurs, est une autre façon de démarrer une activité commerciale. Ces dispositifs peuvent varier de 1 000 à 150 000 euros. Au lancement de son activité, l’entreprise est souvent amenée à demander un prêt à taux zéro (banque, pépinière ou incubateur) ou une aide remboursable (Bpifrance, Régions, chambres consulaires, incubateurs), un prêt d’honneur auprès de Réseau Entreprendre, d’Initiative France ou de l’une des 18 régions de France, par exemple, sans oublier le crédit d’impôt (financement public). Le crowdfunding (aide du grand public par l’intermédiaire de certaines plateformes telles MiiMOSA, KissKissBankBank, Ulule, Notrepetiteentreprise, Bulb in Town…) est en vogue depuis quelques années. Il existe aussi des prêts bancaires spécifiques au lancement, proposés par des banques solidaires comme Nef, des caisses solidaires ou par le crowdlending (crowdfunding par le prêt, avec compensation financière sous forme d’intérêts).

Des porteurs physiques aux personnes morales

Les formes les plus récentes de prêts spécifiques sont à chercher du côté du crowdinvesting, également appelé
EquityCrowdfunding, qui consiste à lever des fonds auprès d’un groupe de particuliers investissant de l’argent en échange d’actions. Ces divers dispositifs de prêt varient de 100 000 à 500 000 euros. Le troisième groupe de levée de fonds, sans doute le plus connu, reste la prise de capital dans une société. Même une start-up peut en bénéficier avec le Love money, qui permet à des particuliers (famille, amis…) de collecter des fonds pour une étude de marché ou encore un prototype. Avec les premiers succès, les entreprises peuvent faire appel au business angels, à savoir des personnes physiques qui entrent au capital de la société. Parmi les plus connus figure Xavier Niel, un expert des télécommunications qui a créé le plus grand incubateur, Station F, basé à Paris. Prétendre à ces dispositifs bancaires exige de la part de l’entrepreneur de contacter les business angels et de se préparer au pitch qu’ils ont l’habitude d’instaurer. « Se lancer seul paraît difficile aujourd’hui, voire impossible pour certains marchés, affirme Aurélien Lepennetier, chargé de mission en Centre-Val de Loire pour Végépolys. L’entrepreneur doit s’intégrer dans un réseau favorable, incubateur, pôle de compétitivité ou chambre de commerce. Il pourra échanger, mutualiser ses expériences, enrichir ses idées, suivre l’actualité, par exemple les divers concours où il peut postuler. » Les porteurs physiques en capitaux peuvent procurer entre 10 000 et 300 000 euros, voire un million d’euros dans certains cas. L’autre volet des apporteurs de capitaux, les personnes morales, se décline sous plusieurs formes. Le capital d’amorçage est dédié, comme son nom l’indique, au démarrage de la société. Peu fréquent, il est proposé par Bpifrance ou par certaines régions qui investissent, comme le Centre-Val de Loire dans Loire Valley Invest, créé en mars 2017. Dans ce cas, les dépenses préalables à la création, à la recherche et développement, aux études, aux brevets, aux frais d’expertise juridique, voire au prototype, sont soutenues entre 300 000 euros et 2 millions d’euros. Pour financer les premiers succès ou le décollage de la société, le capital-risque vise plutôt les prises de participation de 100 000 euros à 10 millions d’euros. Capagro, par exemple, injecte des montants de 1 à 5 millions d’euros dans des start-up en agroalimentaire ayant un produit ou un service voué à se développer à grande échelle. Force A, spécialiste de capteurs en viniculture, ou encore Naïo, pour les robots, ont bénéficié de leurs soutiens. « Les investisseurs en capital d’amorçage se positionnent sur le potentiel marché de l’innovation quand ceux du capital-risque examinent les capacités de scalabilité de l’entreprise. Et souvent plusieurs financeurs interviennent dans la prise au capital », observe Aurélien Lepennetier.

Financer sa campagne publicitaire

Le capital développement concerne des participations de l’ordre du million (500 000 euros à 20 millions d’euros). Il
vise des entreprises déjà bien établies, des PME de plus de dix ans d’activité. Avec le développement de l’entreprise
et les fondateurs dont l’âge de la retraite approche, des capitaux dits « de transmission » existent pour vendre sa
société, par étapes, à des fonds d’investissement. Dans le cadre d’un plan de redressement, les dirigeants peuvent
faire appel à des fonds spécifiques où les liquidités sont indispensables. « Cette option, peu fréquente, nécessite de nombreuses conditions au préalable, souligne Aurélien Lepennetier. L’entreprise doit présenter par exemple un réel potentiel de reprise. Tout dépend aussi des acteurs et de l’activité concernée. » Deux autres types d’investissements permettent aux sociétés de se développer, mais dans un autre registre. It for Equity est une prise de capital en échange d’un service. Elle concerne le plus souvent le domaine informatique et la transition numérique. Orevon, Noveo ou encore Pentalabbs sont des fonds d’investissement qui prennent en charge le développement technologique. Ce dernier annonce par exemple avoir investi 41 millions d‘euros dans des start-up. Media for Equity surfe sur un autre registre : la communication. Des fonds comme 5M Venture, Groupe TF1, Reworld Media prennent des parts de capital dans des sociétés qui souhaitent une large couverture médiatique dans divers supports. 5M Venture a ainsi pris des parts de capital à hauteur de 18 millions d’euros pour plus d’une vingtaine de campagnes médiatiques. Toutes ces formes de levées de fonds engendrent inévitablement des types d’investisseurs différents. Ceux qui se sont spécialisés dans les capitaux d’amorçage ont l’habitude de prendre des risques et savent gérer l’échec. Ce qui n’est pas forcément le cas des autres acteurs.

—— Marie-Dominique GUIHARD (Tribune Verte 2914)

Cycle de vie de l’entreprise : LES CINQ ÉTAPES

  • Idée. Sur l’acquis de connaissance et de compétence, une solution est trouvée à une problématique.
  • Lancement. Une recherche et développement aboutit au dépôt de brevets, à des prototypes, à des études de marché. Un business model démarre.
  • Premiers succès. L’entreprise affiche ses premiers clients. Encore en phase expérimentale, la start-up est créée
    pour améliorer le processus et passer à la phase scalabilité du business model (capacité d’une entreprise à passer au stade industrialisation).
  • Développement. L’entreprise s’internationalise et/ou se diversifie.
  • Maturité. Les besoins en financement stagnent
    Source : Végépolys.