Campus Bougainville : Cultiver les futurs talents agricoles

Campus Bougainville : Cultiver les futurs talents agricoles

À l’image du dynamisme de l’enseignement agricole, le campus Bougainville multiplie les offres de formation, pour des publics diversifiés mais dont seulement 15 % sont issus du milieu agricole. Nombre d’entre eux sont internes, ce qui suppose une organisation particulière, qui ne se restreint pas au seul temps des cours.

«Le campus Bougainville dispense une grande diversité de formations », se réjouit Rémi Prot, son directeur. Ouvert il y a plus de 50 ans, l’établissement regroupe quatre centres : comme souvent, un lycée, un CFPPA et une exploitation agricole accueillent les élèves sur le campus. Le quatrième, unique en France, est le CFPPA « Rungis Académie ». Créé en 2019, il a commencé ses activités en janvier 2023 et est encore en développement. « Ce qui fait son originalité, c’est qu’il est installé au coeur du Min de Rungis, commente Rémi Prot. On peut y préparer le BTS technico-commercial option alimentation et boissons et le BPREA. Mais il dispense aussi des modules d’enseignement spécialisés : apiculture, plantes médicinales et aromatiques, cressiculture, production de safran et de champignons, etc. »

Vivre et étudier sur le campus

L’établissement forme des élèves de lycée, des étudiants, des apprentis et des adultes. Il est possible de passer son bac – bac STAV, bac pro en agricoles…- ou un BTS – Acse, production animale, aménagement rural… Mais les offres de formation ne s’arrêtent pas là. Le bac général « biologie – écologie », qui n’est proposé que par l’enseignement agricole, peut être préparé sur le campus. Enfin, entre le lycée et le CFPPA, de nombreuses formations courtes sont dispensées, en lien avec l’agriculture, l’apiculture, l’horticulture, ou encore les arbres. Malgré tout, Bougainville reste à taille humaine : le lycée accueille cette année 382 élèves. Venus essentiellement des environs, c’est-à-dire de zones périurbaines, ils sont seulement 15 % à être issus du milieu agricole. 202 élèves sont internes. Cette forte proportion de jeunes qui vivent sur le campus du lundi au vendredi suppose une organisation particulière des temps périscolaires. « Nous multiplions les activités socio-éducatives, se réjouit Rémi Prot. Des soirées à thèmes, des sorties, du sport, des clubs de théâtre, de photo… Les associations d’élèves gèrent et organisent, soutenues par les enseignants ». C’est donc toute une vie qui se déploie sur le campus.

Un enseignement intégré à son époque

L’établissement se déclare bien intégré dans son époque, ce qui signifie se préoccuper des enjeux environnementaux, notamment sur l’exploitation. Dotée de 40 vaches allaitantes, d’un atelier porc plein air depuis 2021 et d’un autre en horticulture et maraîchage biologique, elle propose un outil pédagogique qui s’essaye à des modes de production différents. Côté commercialisation, la viande et les légumes de l’exploitation sont vendus dans une halle qui accueille aussi d’autres producteurs locaux.

Soucieux de l’insertion professionnelle de ses étudiants, le campus Bougainville collabore étroitement avec l’APECITA pour le suivi de leurs projets d’orientation. « Nous comptons un taux d’insertion professionnelle de 90 % sept mois après la sortie de notre établissement », annonce fièrement Rémi Prot.

— Emmanuelle BORDON (Tribune Verte 3009)

LES BELLES RÉUSSITES DE L’ENSEIGNEMENT AGRICOLE

L’enseignement agricole en France, ce sont 804 établissements, dont 217 publics et 587 privés, 134 centres de formation d’apprentis et 450 centres de formation continue, auxquels s’ajoutent 17 écoles d’enseignement supérieur agricole. 156 000 élèves y sont accueillis cette année (y compris ceux de BTS), 57 000 apprentis et 16 000 étudiants futurs ingénieurs ou vétérinaires. Parmi eux, on compte 44 % de filles et 56 % de garçons. L’enseignement agricole peut se prévaloir de taux de réussite élevés aux examens. 96 % de réussite en CAP, 97 % en Bac techno, 86 % en Bac pro et 7 % en BTS. Quant à l’insertion professionnelle, elle est de 86 % pour les Bac pro et de 92 % pour les BTS, trois ans après l’obtention du diplôme.

Environnement : LES ÉCO-RESPONSABLES, DES ÉLÈVES INVESTIS DANS LEUR ÉTABLISSEMENT

Sur le campus Bougainville comme dans les autres établissements, les élèves « éco-responsables » sont chargés de sensibiliser leurs camarades aux enjeux environnementaux. Très actifs, ils multiplient les projets et les actions. Rencontre avec Alexandre, éco-responsable très impliqué dans ce rôle.

Sensibiliser les élèves aux causes environnementales, c’est un projet cher à Alexandre, élève en première « biologi-écologie » sur le campus Bougainville. Pour lui, cet engagement vient du collège : la rencontre avec un enseignant en histoire-géographie, qui fait office de révélateur. « Nous avons étudié l’écologie, l’écoresponsabilité, les villes futures… » Pour Alexandre, c’est presque une révélation, et cela le pousse à devenir éco-délégué. À cette époque, la présence d’éco-délégués dans les collèges n’est pas encore obligatoire – elle l’est depuis 2020 – et est inégalement développée. Il embrasse cette fonction avec enthousiasme et entreprend de sensibiliser ses camarades aux enjeux liés à l’environnement. Économies d’énergie, recyclage, sorties découvertes… « Ça a pris, et le travail a porté ses fruits », se réjouit Alexandre. Il fait de cet engagement l’objet de son oral du brevet. Une fois au lycée, c’est naturellement qu’il poursuit ce travail. Et il se passionne au point de rejoindre la section biologie-écologie, plutôt qu’une filière scientifique. Comme elle se prépare exclusivement en lycée agricole, il rejoint alors le campus Bougainville. Ce changement d’établissement lui fait laisser le poste d’éco-délégué pour celui d’écoresponsable. « Il y a peu de différence ; c’est juste une question d’appellation, en fonction du ministère dont on relève », précise-t-il.

Des projets tous azimuts
Éco-délégué ou éco-responsable, rien ne change sur le fond. La mission consiste à sensibiliser les autres élèves à l’environnement, à mettre en place des actions et à les inviter à y contribuer. La sensibilisation se fait par voie d’affichage ou sur les réseaux sociaux, mais surtout par le dialogue. En matière d’actions, ses camarades et lui ont déjà réussi à instaurer le tri à la cantine et à mettre en place une collecte de bouchons qui sont ensuite réduits en copeaux et vendus. Les fonds sont versés à des associations de personnes handicapées. Des randonnées dans les bois ont aussi été organisées pendant le temps périscolaire. « Nos prochains projets sont de planter des arbres aux abords de la cour, explique-t-il. Des fruitiers, pour que les élèves puissent picorer ». C’est ainsi que des pommiers, des poiriers et des framboisiers pourraient pousser bientôt sur le campus. « Nous voulons aussi sensibiliser les collégiens : les faire venir au lycée pour un atelier de rempotage de plantes. Chacun d’eux repartira avec la sienne », ajoute-t-il. À plus long terme, les éco-responsables voudraient créer un amphithéâtre de verdure, pour faire cours dehors, un jardin de mandala en permaculture, un concours de photos de nature en partenariat avec le club photo… Les idées ne manquent pas.

Des débouchés professionnels
Balbutiante à ses débuts, la mission des éco-responsables s’est affirmée progressivement. Sur le campus Bougainville, c’est Isabelle Sourd, la CPE, qui gère et représente ces élèves. Pour elle, « la fonction d’éco-responsable contribue à former les futurs citoyens et à construire leur personnalité. Ils apprennent à construire un projet et à s’organiser ». Son rôle à elle consiste à encadrer les groupes et à encourager les élèves dans leurs projets. « J’ai impulsé des visites et des plantations, je fais en sorte que les élèves participent et soient force de proposition », précise-t-elle. Parfois, l’engagement va jusqu’à influencer le projet professionnel. C’est le cas pour Alexandre. « Lorsque j’étais au collège, je voulais être pilote d’avion, se souvient-il. Mais finalement, j’aimerais travailler dans le domaine de la santé, ou dans l’écologie et l’environnement ».

— Emmanuelle BORDON (Tribune Verte 3009)