De l’importance de bien se faire accompagner : Incubateur et accélérateur, les deux chevilles ouvrières

De l’importance de bien se faire accompagner : Incubateur et accélérateur, les deux chevilles ouvrières

Depuis une dizaine d’années, les start-up bénéficient de plus en plusde services, qui les aident d’abord à formaliser puis à financer leur projet. Expérience avec EuraTechnologies et Le Village by CA.

Créer sa start-up ne s’improvise pas. Sans accompagnement, celle-ci a peu de chance d’être pérenne. Les incubateurs d’abord, les accélérateurs ensuite, aident les fondateurs à construire leurs projets, à piloter leur développement, et à assurer leur accès au marché. EuraTechnologies, basé à Lille et inauguré en 2009, est un incubateur et un accélérateur qui accompagne plus de 100 porteurs de projet par an. Installé au Blan-Lafont, il a été dédié aux TIC (technique de l’information et de la communication) par la communauté urbaine de Lille. Par définition, un incubateur est la structure qui accompagne les entrepreneurs vers la création de leur start-up et vers la commercialisation de leur produit ou de leur service. En aucun cas il ne participe au financement de l’entreprise. C’est l’accélérateur comme Village by CA qui aide ensuite à lever des fonds pour booster le développement. Mais avant d’en franchir la porte, de nombreux paliers sont à atteindre. Lorsqu’un porteur de projet postule au programme d’incubation de EuraTechnologies, il doit avoir effectué « un premier niveau d’étude sur le marché et la concurrence, et avoir imaginé
un positionnement différenciant ». Chaque année, EuraTechnologies accueille trois promotions de porteurs de projet dans son incubateur et plus de 50 start-up dans son programme d’accélération.

Apprendre et échanger

Sencrop, qui commercialise des stations météo connectées et les outils d’aide à la décision qui leur sont liées, a ainsi séduit le jury d’EuraTechnologies. « Nous étions les premiers entrants sur ce marché, se souvient Martin Ducroquet, cofondateur avec Michael Bruniaux de Sencrop. Et notre produit correspondait à une véritable attente de nos clients que sont les agriculteurs et les conseillers techniques. » Créée en 2016, Sencrop comptabilise 35 salariés, bientôt 50 dans les mois à venir. Le projet est né au sein d’EuraTechnologies. « Je présentais une autre start-up, commente
Martin Ducroquet, lorsque j’ai rencontré, à EuraTechnologies, Michael, qui avait déjà développé des capteurs intelligents. Nos
deux domaines étaient complémentaires, celui de l’agriculture dont je suis issu, et le sien qui traite du numérique. Faire partie
d’un incubateur permet de gagner beaucoup de temps et d’éviter les erreurs. Notre réussite tient aussi au fait que nous avons suivi tous les deux la formation Stanford-Lille Innovation & Entrepreneurship Program, une formation certifiante qui se tient sur le campus de Stanford, aux États-Unis, et à EuraTechnologies. Nous y avons rencontré beaucoup d’entrepreneurs, ceux qui faisaient partie du voyage, mais aussi des enseignants et des chercheurs américains. » EuraTechnologies, qui affirme que le taux de survie des start-up qui ont profité de ses services est de 82 % après cinq ans d’exercice, a établi tout un programme afin que les jeunes talents puissent « prototyper en 80 jours ». « L’un des objectifs, affirme Yann Kervarec, directeur des programmes d’accompagnement, est de transmettre les codes en matière
de création et de gestion d’entreprise. »

Des programmes cadrés et multiples

Des espaces de coworking de 700 m² sont à la disposition des futurs entrepreneurs qui peuvent peaufiner leur projet et échanger avec d’autres. Apprendre et échanger est donc au coeur du dispositif. Une vingtaine d’ateliers et de formations thématiques sont animés par des experts du business model, de la maîtrise du pitch, des études de marché, du business plan, des levées de fonds… Durant toute la durée du programme, un coaching individuel est assuré et des rencontres organisées avec un réseau d’entrepreneurs confirmés, des experts métiers et des business angels, premiers maillons de la chaîne de financement. L’incubateur lillois organise aussi un programme de parrainage avec des entrepreneurs de son écosystème, mais aussi de France et de l’international. Il multiplie les événements : hackathon, start-up week-end, meetup. Les entrepreneurs bénéficient également de ressources issues des laboratoires et des centres de recherche situés dans la zone d’activités. Enfin, des programmes spécifiques sont dédiés. AgTech, par exemple, est un programme d’incubation adapté aux porteurs de projet innovants dans les domaines de l’agriculture. Le même schéma de formation est ainsi répété et des tests de viabilité du produit sont établis chez des agriculteurs de la région à Willems. Sencrop n’a pas bénéficié de ce dispositif, mais la start-up a testé néanmoins son produit chez des agriculteurs. Aujourd’hui, Sencrop a ses propres locaux, proches d’EuraTechnologies. Ce qui permet aux fondateurs d’être toujours en contact avec une palette de spécialistes et d‘entrepreneurs. Mais avant de prendre un bail, ils ont bénéficié des services de l’accélérateur Le Village by CA. Facilitateur de leur développement, il apporte une offre complète dédiée à l’industrialisation et à l’accélération. Porté par les caisses régionales du Crédit Agricole, Le Village by CA s’est construit en réseau de 30 lieux et dispositifs dédiés à l’open innovation et à l’accélération des start-up. Le Village by CA offre l’hébergement et les infrastructures, l’accès au réseau et aux bureaux internationaux du Crédit Agricole. Comme EuraTechnologies, un programme très concret en sept étapes est proposé, où il est question de stratégie et de modélisation, de marketing, de commercialisation, de pilotage et de protection de son activité, de développement à l’international,
de levée de fonds, de management en ressources humaines. Le Village met aussi les start-up en relation avec des partenaires
entreprises. Ces ambassadeurs, après les avoir sélectionnées, leur apportent leur expérience et leur expertise. Depuis deux ans,
l’accélérateur joue l’intermédiaire entre les start-up et les grands groupes. Non seulement les start-up y trouvent un intérêt, mais les entreprises partenaires aussi. Ces dernières en profitent par exemple pour évoluer et pour nourrir leurs propres innovations. À ce jour, près de 700 start-up sont accompagnées par le réseau. Certains Villages sont monothématiques, comme ceux de Caen et de Châteaudun qui sont dédiés à l’agri-agro. Le Village by CA Ille-et-Vilaine héberge une vingtaine de start-up sur 1 000 m². Il soutient des entreprises dans six domaines, dont l’agriculture et l’agroalimentaire.

Des financements plus accessibles

Applifarm a profité de ses services. Plateforme d’échange, de valorisation et de traçabilité des données d’élevage, Applifarm a
été créée par huit entreprises de l’agriculture ¹. « Nous étions confrontés à la diffusion des données dans le cadre de projets de recherche, affirme Xavier Wagner. Les partager via une plateforme, ouverte à l’ensemble de la profession, nous a paru une solution et une opportunité à saisir. Disposer d’un bureau et de tout l’équipement nécessaire au sein d’un accélérateur comme Le Village by CA a été bénéfique. Cela nous permet de grandir sans avoir à déménager et d’enrichir nos contacts. Et Le Village by CA est très réactif pour nous mettre en contact avec, notamment, les partenaires financiers. »

—— Marie-Dominique GUIHARD

(1) Néovia, Evolution, Ceva, Cogedis, Bretagne conseil élevage ouest, Innoval Eilyps, Adisseo et GDS Bretagne.

Réseau Entreprendre : ACTEUR DE CRÉATION D’EMPLOIS

Reconnu d’utilité publique, Réseau Entreprendre a pour objet de favoriser la création. En 33 ans, 100 000 emplois ont ainsi vu le jour. Le réseau accompagne des entrepreneurs pour les aider à
réussir leur création, la reprise ou la croissance d’entreprise et donc développer de l’emploi. En intégrant le réseau, l’entrepreneur s’engage notamment à participer à une chaîne d’entraide entre
entrepreneurs. L’accompagnement se décline en trois volets : un suivi individuel, un prêt à la personne à taux zéro sans garantie, ce qui prélude à l’obtention d’autres prêts, et enfin, l’adhésion
au club des lauréats. Chaque année, 1 500 entrepreneurs en bénéficient. « Ces dernières années, relève Noémie Caquineau, responsable communication externe Réseau Entreprendre, nous avons évolué dans notre process d’accompagnement pour répondre aux besoins des start-up. Certaines ont besoin d’un investissement important au départ, notamment en recherche et développement. »

Dilepix : D’EURATECHNOLOGIES AU VILLAGE BY CA

Fondée par Aurélien Yol, ancien ingénieur d’Inria (Institut nationale de recherche dédiée aux sciences) et Alban Pobla, ancien actif de la chambre de commerce et d’industrie de Bretagne, la start-up est une plateforme digitale qui permet une analyse rapide, intelligente et en temps réel des images provenant des objets connectés (caméras, pièges à insectes, drone, capteurs)
d’une exploitation agricole. Lauréat de nombreux concours (I-lab, Agtech, Crisalide numériqe…), Dilepix a intégré EuraTechnologies, puis Le Village by CA. « EuraTechnologies nous a permis d’évoluer rapidement par leurs formations, les échanges avec les experts et les autres start-up. Le Village by CA nous a rapprochés du secteur agricole. Nous avons ainsi été sélectionnés pour assister au CES (Global Stage for Innovation) de Las Vegas (États-Unis),  s’enthousiasme Alban Pobla. Et les retombées ont été au-delà de nos espérances. Non seulement nous y avons gagné en visibilité, mais nous avons contacté de futurs prospects, des clients et des partenaires techniques. »

La Boussole : UN GUIDE SPÉCIFIQUE

En collaboration avec le Boston Consulting Group, La Boussole, qui regroupe dix structures d’accompagnement dont Le Village by CA et le Réseau Entreprendre, a édité un guide « à l’attention des entrepreneurs, pour leur permettre de choisir avec discernement le type d’accompagnement répondant aux besoins spécifiques de leur étape de développement, mais aussi à l’attention des accompagnateurs pour leur permettre de maximiser leur impact auprès des entrepreneurs ». Ainsi, le guide définit les cinq étapes du futur entrepreneur, les clés du choix des accompagnateurs et les règles à respecter afin de profiter de leurs compétences. Des conseils sont également adressés aux accompagnateurs, et des pistes de réflexion enrichissent le guide.

Péligourmet : DE L’EXPÉRIENCE ACQUISE

Lauréat du Réseau Entreprendre 2019, Péligourmet permet aux consommateurs et aux restaurateurs de s’approvisionner directement auprès des producteurs. Les commandes sont regroupées dans une exploitation pour en simplifier la logistique. Les produits sont ensuite acheminés à Gentilly (94) pour être distribués. « Sans expérience entrepreneuriale, mon objectif était d’être accompagnée pour finaliser mon projet, affirme Laure Le Jossec. Je suis passée par six incubateurs¹ qui m’ont hébergée gratuitement et j’ai refusé les structures souhaitant entrer au capital de mon entreprise. J’ai postulé en fonction de l’expertise de l’incubateur et de son réseau. Par exemple, j’ai passé un partenariat avec des enseignes de la grande distribution qui font office de point relais pour mes clients, une façon pour eux de capter une nouvelle clientèle. » De son expérience, Laure Le Jossec témoigne : « Le futur entrepreneur doit tout de suite tester son idée sur le terrain pour évaluer l’appétence du projet, l’approche technique vient seulement dans un second temps. »

(1) La Ruche, Le comptoir de l’innovation, Wai We are Innovation by BNP Paribas, Antropia Essec, Accenture et groupe SOS.