« Interbev, porte-parole de la filière bétail et viande »

« Interbev, porte-parole de la filière bétail et viande »

Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes, Interbev regroupe 21 organisations couvrant l’élevage, le commerce de bétail, l’abattage et la transformation des viandes, la distribution (en boucherie artisanale et en GMS) et la restauration. Marc Pagès, directeur général de l’interprofession, nous présente la structure et les défis auxquels elle doit faire face : défense de la filière française dans le cadre des accords de libre-échange, répartition plus équitable de la valeur, nouvelles attentes sociétales…

Qu’est-ce qu’Interbev et quelles sont ses missions ?
Marc Pagès : Fondée en 1979, Interbev est l’association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes. Interprofession dite « de la fourche à la fourchette », elle regroupe 21 organisations représentatives des maillons de la filière, de l’élevage à la commercialisation des viandes, pour cinq espèces1. Elle fonctionne avec quatre collèges : producteurs (syndicalisme agricole…), mise en marché (coopératives, négoces et marchés aux bestiaux…), abattage et transformation (abattoirs, grossistes en viande…) et distribution (boucherie artisanale, grande distribution, restauration). Toute décision est prise à l’unanimité. Grâce à cette organisation, Interbev peut mener à bien ses différentes missions. Elle doit principalement gérer les accords interprofessionnels sur les plans techniques (pesée des animaux, classement, marquage des carcasses, transfert de propriété…), qualitatifs (critères de sélection des viandes…) et concernant les cotisations. L’interprofession déploie également des programmes de communication (70 % de son budget) dans l’objectif de valoriser la filière, ses métiers et les viandes. Interbev a également pour mission de définir, de rédiger et d’étendre sur le terrain les guides de bonnes pratiques (en élevage, en transport, en abattage…), de mener une activité de recherche et développement générique et de travailler sur les enjeux sociétaux à travers son pacte pour un engagement sociétal. C’est notamment dans le cadre de celui-ci (une démarche RSO labellisée par l’Afnor) que sont organisées des concertations avec des ONG (environnementales, de protection animale, mais aussi des associations de consommateurs) pour inscrire l’ensemble de la chaîne de production dans une démarche de progrès continu. Ces missions font d’Interbev un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics français et européens, et lui confèrent un poids important dans les orientations au niveau gouvernemental ou législatif.

Quels sont les principaux dossiers actuellement suivis par Interbev ?
M. P. : Comme bon nombre d’interprofessions, Interbev a élaboré, dans le cadre des états généraux de l’alimentation, des plans (par espèces) destinés à encourager la consommation de viande française et à assurer une répartition plus équitable de la valeur au sein de la filière. Le travail défini et adopté porte sur la mise en place de la contractualisation (un outil moteur pour l’organisation et la structuration de la filière), sur la montée en gamme des viandes (avec une offre plus importante de viandes label Rouge, davantage de bio), sur la prise en compte des attentes sociétales pour améliorer les pratiques et sur la consolidation de la présence  française sur les marchés européens. Nous attendons de tous ces projets une plus juste rémunération des producteurs.

Un autre dossier d’envergure porte sur les accords de libreéchange (Ceta, UE-Mercosur, Océanie). Concrètement, Interbev tente de faire en sorte que les filières françaises et européennes ne servent pas de monnaie d’échange dans ces accords commerciaux et qu’elles ne soient pas sacrifiées au nom du libre-échange. L’interprofession se mobilise pour veiller à l’équilibre du secteur des viandes au niveau européen, et pour défendre les productions françaises, avec leurs spécificités et leurs contraintes.

La filière élevage et viande est-elle toujours pourvoyeuse d’emplois ?
M. P. : La filière élevage et viande représente plus de 500 000 emplois directs ou indirects en France. Elle est en constant recrutement et ce, au sein de presque tous les maillons. C’est le cas en élevage, où le vieillissement des chefs d’exploitation et le renouvellement des générations ouvrent des besoins d’installation de jeunes éleveurs. Les offres sont nombreuses dans les entreprises de commerce et de transport des animaux et dans celles de l’abattage/découpe. Les besoins en main-d’oeuvre qualifiée sont importants dans l’abattage et les cadres sont très recherchés dans la transformation des viandes.

À noter que de nouveaux métiers apparaissent dans chaque domaine de la filière. Que ce soit en élevage, dans la mise en marché ou dans la transformation, les nouvelles réglementations environnementales et de bien-être animal se traduisent par la création de fonctions : technicien et ingénieur chargé de diagnostics environnementaux, responsable protection animale dans les abattoirs. Dans la transformation, l’arrivée d’outils d’assistance technique et la robotisation nécessitent désormais l’embauche de techniciens qualifiés dans l’usage de ces nouveaux équipements.

Les modes de vie changent, tout comme les comportements alimentaires des Français, qui privilégient de plus en plus une consommation modérée de viande, voire une alimentation sans viande. Quelle est la réponse des professionnels de la filière à ces nouveaux comportements ?
M. P. : Ce constat, les professionnels de la filière élevage et viande, réunis au sein d’Interbev, l’ont fait depuis plusieurs années et ils se sont engagés à répondre à ces nouveaux enjeux de durabilité. D’une part, grâce à leur démarche collective de responsabilité sociétale, le pacte pour un engagement sociétal destiné à intégrer toujours mieux les attentes de la société. Cette démarche permet de structurer les différentes avancées et d’apporter aux consommateurs des garanties sur l’évolution de nos pratiques en matière de préservation de l’environnement et des territoires, de bien-être, de protection et de santé des animaux, de respect des salariés, de qualité de l’alimentation, de la nutrition et de l’information des consommateurs. D’autre part, par le biais de la montée en gamme des viandes de l’interprofession, qui est l’un des objectifs des plans de filière issus des états généraux de l’alimentation, comme dit précédemment.

Pour le faire savoir, l’interprofession a lancé, en 2019, une campagne de communication collective portée par le slogan « Aimez la viande, mangez-en mieux », signée « Naturellement Flexitariens ». Elle puise son fondement dans une profonde conviction : des éleveurs aux consommateurs, nous pouvons tous avoir un impact positif sur le terroir comme sur notre santé, en mangeant la juste quantité d’une viande de qualité et en consommant mieux. Cette campagne vise à lancer un dialogue sincère avec les consommateurs et à leur montrer en quoi la filière élevage et viande a un rôle central à̀ jouer pour mieux nourrir les Français dans le respect de la planète et du vivant : des Français qui sont « naturellement flexitariens ».

—— PROPOS RECUEILLIS PAR Danielle BODIOU (Tribune Verte 2921)
(1) Bovins, veaux, ovins, équins et caprins.