L’offboarding ou comment soigner le départ de ses collaborateurs

L’offboarding ou comment soigner le départ de ses collaborateurs

Pour assurer le transfert de compétences, maintenir une cohésion d’équipe et renforcer sa marque employeur, un employeur a tout intérêt à se montrer bon joueur et à faciliter le départ de ses salariés démissionnaires.

Le concept d’onboarding est désormais bien connu des entreprises. Dans la guerre actuelle des talents, elles ont compris qu’elles devaient soigner le parcours d’intégration de leurs recrues, afin de les mettre dans les meilleures dispositions. Mais qu’en est-il des salariés qui la quittent ? C’est tout l’enjeu de l’offboarding, qui consiste à gérer et faciliter le départ, avec pour objectif que celui-ci se déroule de la manière la plus constructive possible. Un offboarding réussi présente plusieurs atouts. En anticipant le départ de son collaborateur, l’entreprise assure dans de bonnes conditions le transfert de compétences. Elle met à profit la période de préavis, qui peut durer plusieurs semaines, pour opérer un passage de relais en douceur avec son successeur.

En interne, un départ réussi maintient une bonne ambiance et dynamique de travail. Les autres collaborateurs voient qu’il est possible de divorcer à l’amiable. En externe, l’entreprise se prémunit d’éventuels commentaires désagréables à son égard. Un enjeu clé à l’heure des réseaux sociaux qui amplifient les témoignages négatifs.

Par ailleurs, il s’agit de ne pas injurier l’avenir. Alors que les carrières sont de moins en moins linéaires, les recrutements dits « boomerang » se multiplient, à savoir le retour d’ex-employés au bercail. Un phénomène qui ne présente que des avantages, selon Amandine Mayer, senior manager au cabinet Tempo & Co, filiale de Colombus Consulting : « En allant voir ailleurs, le salarié a acquis de nouvelles expériences et compétences, appréhendé d’autres pratiques. Il retourne auprès de son ancien employeur chargé de ce vécu, tout en maîtrisant les processus et outils de ce dernier. Il revient en connaissance de cause, ayant déjà expérimenté la culture de l’entreprise. »

Se séparer en douceur et garder le contact

Comment réussir cet off boarding ? Comme pour l’onboarding, il s’agit tout d’abord de faciliter le parcours administratif du salarié sur le départ. S’agissant d’un processus transverse, plusieurs directions sont concernées.

La DRH assure la tenue du solde de tout compte et remet les différents documents de fin de contrat. Les services généraux récupèrent le badge d’entrée ou la carte de la cantine. La direction juridique impose éventuellement une clause de non-concurrence. La DSI ferme les droits d’accès au système d’information afin d’éviter d’éventuels actes malveillants de la part de salariés partis fâchés.

Comme pour l’onboarding, il existe des solutions logicielles comme celles proposées par Workelo ou HeyTeam pour  digitaliser ce parcours. L’offboarding ne se limite toutefois pas à ce volet logistique. Certaines entreprises vont plus loin, comme dispenser des conseils pour rédiger un CV, se préparer à un entretien d’embauche ou financer un bilan de compétences.

Le volet humain est, bien sûr, le plus important. L’entreprise communiquera – avec l’accord de l’intéressé – sur les raisons du départ pour éviter les rumeurs et les nondits. Le futur ex-salarié doit aussi pouvoir dire au revoir à ses collègues sereinement TEMPO & CO et comme il l’entend en organisant un pot et/ou en envoyant un mail collectif.

Il s’agit enfin de garder le contact. Au-delà du retour possible de l’enfant prodigue, celui-ci peut occuper des fonctions qui l’amèneront à devenir client, fournisseur ou partenaire de son ex-employeur. À l’image des Alumni des grandes écoles, des entreprises constituent des clubs d’anciens employés.

— Xavier BISEUL (Tribune Verte 3001)

Avis d’expert : « TOUT SALARIÉ EST AMBASSADEUR DE LA MARQUE EMPLOYEUR »

Amandine Mayer, senior manager pour Tempo & Co

Quelles bonnes pratiques mettre en oeuvre pour réussir l’offboarding ?
Amandine Mayer : Certains cas d’offboarding peuvent être largement anticipés quand la date est connue, comme un départ à la retraite. L’entreprise peut valoriser les compétences du futur retraité en lui proposant des activités parallèles à son métier, dans le milieu associatif par exemple, ou en l’aidant à se projeter dans sa nouvelle vie. Un employeur ne dispose pas toujours de ce temps de préparation. Une revue du personnel doit permettre d’identifier, en amont, les successeurs potentiels des différents collaborateurs clés, afin de ne pas être pris de court. À défaut, l’employeur perd de précieux jours et semaines pour effectuer le passage de relais.

Quel rôle le manageur de proximité peut-il jouer ?
A. M. : Son rôle étant avant tout de faire grandir les collaborateurs, un manageur peut considérer, à tort, qu’accompagner les salariés sur le départ est une perte de temps et d’énergie. C’est pourtant un enjeu clé pour maintenir une bonne dynamique au sein de son équipe. Ses collègues sauront que, s’ils partent, ils bénéficieront d’un traitement équivalent. N’oublions pas, par ailleurs, qu’ils sont ambassadeurs de la marque employeur. Des actions de sensibilisation doivent permettre au manageur de changer de posture. Il va, par exemple, remettre au démissionnaire une lettre de recommandation. Il peut aussi mener un entretien d’évaluation en faisant un bilan de la période où celui-ci a été présent, en lui suggérant des axes de progrès.

Quels sont les risques d’un départ mal négocié ?
A. M. : Les réseaux sociaux et les sites de notation d’employeurs de type Glassdoor créent une caisse de résonance. Un salarié parti fâché le fera savoir bien au-delà de sa sphère professionnelle, familiale ou amicale. Les campagnes « balance ton agence » ou « balance ton boss » sur Instagram, qui relaient ce type de témoignages, ont des impacts très négatifs sur une marque employeur. Avant de postuler, les actifs, et tout particulièrement ceux des nouvelles générations Y et Z, se renseignent en ligne sur l’entreprise qu’ils convoitent.

Étude : GRANDE DÉMISSION : UN PHÉNOMÈNE LIMITÉ EN FRANCE

Le phénomène de « Grande démission » a-t-il traversé l’Atlantique ? Pour rappel, cette expression désigne les vagues de démissions qui ont secoué les États-Unis avec la crise de la Covid-19. Une note de la Dares éditée par le ministère du Travail répond par la négative. Au premier trimestre 2022, le taux de démission en France se situe à 2,7 % ; un plus haut depuis la crise financière de 2008-2009, mais qui reste en deçà des niveaux atteints avant, soit début 2008 (2,9 %). La Dares rappelle que le taux de démission est un indicateur cyclique. Il est bas durant les crises et augmente en période d’embellie économique. La hausse de ce taux serait donc due à la reprise d’activité à la suite de la crise sanitaire. Les difficultés de recrutement que connaissent certains secteurs, dont l’agriculture, créent des opportunités dont se saisissent des salariés pour démissionner et valoriser au passage leur salaire.