Recrutement : Faire de la diversité un levier d'attractivité

Recrutement : Faire de la diversité un levier d'attractivité

Au-delà des exigences réglementaires, une stratégie en faveur de la diversité et de l’inclusion permet à une entreprise gagner en attractivité, en productivité et en créativité. Du recrutement à la gestion de carrières, elle porte sur tous les processus RH.

Une stratégie en faveur de la diversité et de l’inclusion ne se limite pas à se conformer aux exigences réglementaires en termes d’égalité femmes-hommes ou d’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. Comme le montre une étude du cabinet Deloitte (lire encadré), les entreprises intégrant une pluralité ethnique, culturelle ou sociale de leurs profils gagnent en productivité et en créativité. La diversité est également un levier d’attraction et de rétention des talents dans une stratégie de marque employeur. Enfin, en réduisant les risques de discrimination raciale ou sexuelle, une entreprise préserve sa réputation.

Alors qu’on pouvait craindre qu’avec la pandémie ce sujet soit mis de côté, les entreprises se recentrant sur des enjeux business, ce n’est visiblement pas le cas. « Les pratiques des entreprises pour promouvoir la diversité et l’inclusion ont beaucoup progressé l’année dernière comme l’illustre notre dernier rapport annuel, avance Malvina de Corbier, auditrice RH au sein du Top Employers Institute. 81 % des Top Employers ont mis en place une politique et des programmes pour coordonner leurs actions. Et la tendance se confirme cette année. »

Des preuves, pas de la communication

Ce type de programme doit couvrir l’ensemble des processus RH, du recrutement à la gestion de carrières en passant par l’aménagement du poste travail et des horaires ou la transparence dans la politique de rémunération et de promotion. Si l’on s’attarde sur le recrutement, l’offre d’emploi doit être inclusive et rappeler l’intérêt de l’entreprise que porte sur le principe d’égalité des chances.

« Le discours doit toutefois être illustré par des éléments de preuve, comme la signature d’une charte ou le témoignage de collaborateurs, afin de ne pas tomber dans les travers de la communication, poursuit Malvina de Corbier. Les candidats ne seraient pas dupes. » En ce qui concerne ensuite la sélection des candidats, « les entreprises peuvent recourir au recrutement sans CV, aux tests d’aptitude et aux mises en situation afin de recruter sur leurs compétences et l’adéquation avec les valeurs de l’entreprise, et non sur les seuls critères du diplôme et de l’expérience. »

Une fois la personne embauchée, il s’agit de lui assurer une égalité d’accès à la formation, à la mobilité interne ou aux promotions. Comme toute stratégie RH, elle doit faire l’objet d’une phase d’audit suivie de la définition d’un plan d’actions dont l’état d’avancement sera mesuré par des indicateurs clés dans une démarche d’amélioration continue.

Plus généralement, il s’agit d’insuffler une culture de la diversité du terrain au comité de direction afin de lutter contre les stéréotypes et les biais inconscients. Associée à la direction de la communication interne, la DRH est, bien entendu, attendue pour mener ce chantier, de la rédaction d’une charte interne à la sensibilisation des cadres intermédiaires à ces enjeux en passant par la création d’une cellule de signalement des discriminations.

Bien sûr, il n’existe pas de stratégie type. Chaque entreprise doit composer avec ses spécificités comme le rappelle Malvina de Corbier. « La maturité d’une entreprise sur sa capacité à donner la parole et ouvrir la réflexion sur les différentes thématiques de la diversité dépend de son histoire, de sa culture et de ses enjeux. Pour certaines, certains sujets peuvent être jugés encore trop sensibles. »

—— Xavier BISEUL (Tribune Verte 2967)

Avis d’expert : « DES BIAIS INCONSCIENTS PEUVENT AFFECTER LA PRISE DE DÉCISION »

Malvina de Corbier, auditrice RH au sein du Top Employers Institute

Comment mener une stratégie de diversité et d’inclusion ?
M. C. : Tout commence par une phase d’audit. Il s’agit de passer en revue tous les processus RH sous ce prisme : le recrutement, l’organisation du travail, les promotions, l’évolution de carrières, la reconnaissance… Est-ce que l’organisation a développé une culture favorable à la diversité et l’inclusion ? Quand les équipes RH font une revue des potentiels, intègrent-elles ce facteur dans l’évaluation sans pour autant passer par un système de quotas ? Lors de l’analyse des pratiques internes et des comportements, un regard extérieur peut être un plus. Cela permet de prendre de la hauteur, d’identifier des champs inexplorés, de benchmarker l’organisation sur les meilleures pratiques du marché. Une entreprise peut faire appel à des consultants ou solliciter des réseaux externes, comme l’Agefiph, qui émettront des recommandations.

Le plan d’actions doit être assorti de critères de suivi. Cela ne sert à rien de définir des objectifs si on ne mesure pas les progrès accomplis. Ces indicateurs seront différents selon le profil de l’entreprise, sa taille, son secteur d’activité. Des organisations fixent comme priorités la féminisation de l’effectif ou la politique handicap, d’autres la diversité des profils. Les représentants du personnel seront associés dans la définition de ces indicateurs.

Quelles catégories de personnel faut-il impliquer ?
M. C. : Toutes. Cette thématique doit être portée au plus haut de l’entreprise avec un engagement fort des membres du comité de direction. Des cadres dirigeants peuvent être sponsors d’initiatives et faire apparaître le sujet de la diversité et de l’inclusion dans les objectifs stratégiques. Dans certaines organisations matures, un comité interne a été créé pour piloter le plan d’actions.

Ensuite, des efforts particuliers doivent être entrepris auprès du management de proximité. Dans leur parcours de formation, un module les sensibilisera spécifiquement à ce sujet. Des managers peuvent développer des biais inconscients et reproduire certains schémas ou s’arrêter à la première impression. Ce qui peut affecter leur prise de décision notamment lors de l’attribution des promotions. Il s’agit de leur faire prendre conscience de ces biais pour qu’ils puissent faire évoluer leurs pratiques.

Certaines entreprises créent aussi des communautés de managers, physiques ou virtuelles, afin d’échanger entre pairs sur le sujet. La prise en compte des problématiques de diversité et d’inclusion peut aussi faire partie des critères d’évaluation et de rémunération des cadres. Enfin, il ne fait pas oublier d’associer les collaborateurs qui doivent coconstruire le plan d’actions. Des groupes de travail vont nourrir la réflexion et apporter des éléments de réponses correspondants à leurs attentes. Une entreprise peut aussi lancer des enquêtes pour sonder les collaborateurs, en fonction d’un sujet ou de l’actualité.

Étude : LA DIVERSITÉ ET L’INCLUSION, DES ENJEUX BUSINESS ET POURTANT…

Selon une étude de Deloitte de novembre 2019, près de 80 % des DRH et dirigeants interrogés considèrent que la diversité et l’inclusion se révèlent être des avantages compétitifs. Les entreprises matures sur le sujet auraient 60 % de chances supplémentaires de voir leurs profits augmenter, d’améliorer leur réputation, d’attirer et conserver les talents, de gagner en créativité et en innovation.

Pour autant, les inégalités persistent. Les comités exécutifs des grandes multinationales (SBF 120) ne sont composés qu’à 15 % de femmes. Et du côté jeunes actifs (18 à 34 ans), 57 % estiment que leur entreprise devrait accroître la diversité et l’inclusion sur leur lieu de travail