Recrutement par simulation : au-delà du CV

Recrutement par simulation : au-delà du CV

Si, traditionnellement, la sélection des candidats s’opère au regard de la formation reçue et de l’expérience professionnelle, la méthode de recrutement par simulation consiste à évaluer, par une mise en situation, les capacités nécessaires au poste proposé.

Mise en place par Pôle emploi dans les années 1990, la méthode de recrutement par simulation (MRS) permet d’aborder autrement le recrutement, notamment dans des secteurs tendus. Certains postes n’exigent pas de diplômes ou d’expérience particulière. Seules des aptitudes à effectuer certains gestes précis sont exigées. Trouver des profils capables de mettre en oeuvre leurs compétences dans un secteur qui ne leur était pas ouvert initialement : voilà tout l’intérêt de la démarche !

Si cette méthode a été créée dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre dans certains secteurs d’activité, elle peut être utilisée dans d’autres domaines pour améliorer l’adéquation entre les tâches affectées et les compétences du candidat. Dans le monde agricole qui peine à recruter, la MRS a été mise en place pour compléter d’autres dispositifs classiques de recrutement. Nathalie Fiancette, responsable de l’équipe MRS de Valence pour Pôle emploi, le confirme : « Si la MRS a surtout été utilisée dans l’industrie, nous avons dupliqué le modèle pour des postes dans l’agricole : aide caviste, ouvrier agricole d’élevage, ouvrier arboricole, ouvrier de chai, ouvrier maraîcher, ouvrier viticole et ouvrier horticole… » Effectuer ces simulations exige une certaine logistique : cela nécessite de déplacer les équipes et d’emporter le matériel nécessaire aux exercices. Aussi, afin de mutualiser les moyens, Pôle emploi veille à regrouper les besoins de recrutement de plusieurs exploitations agricoles sur un même territoire. L’analyse de poste étant un processus plus poussé, l’observation est, la plupart du temps, privilégiée.

Des rencontres « à l’aveugle »

La méthode prévoit un recrutement qui s’opère en trois étapes. Dans un premier temps, Pôle emploi organise des séances d’information pour éclairer les candidats sur les contours du poste. La diversité des tâches à effectuer, le cadre hiérarchique et les conditions d’exercice sont alors détaillés. Au cours d’une deuxième rencontre, les candidats participent à une séance d’évaluation au travers d’exercices divers, portant sur le respect des normes et des consignes, le travail sous pression, le travail en équipe, la relation au service des clients, l’organisation, l’adaptation au changement… Ceux qui réussissent cette deuxième étape sont ensuite soumis à un entretien individuel au cours duquel leurs motivations sont entendues directement par les employeurs. En effet, la motivation demeure un des leviers essentiels de l’embauche qui peut s’effectuer dans des délais très courts. Concrètement, les employeurs rencontrent alors des candidats dont ils ignorent tout du CV.

Les tests proposés aux candidats sont élaborés par les services de Pôle emploi, en étroite collaboration avec les entreprises qui recrutent. C’est la garantie d’une meilleure adéquation entre ce que le marché de l’emploi recherche et les capacités des demandeurs. Concrètement dans le secteur agricole il s’agit de soumettre les candidats à une série de tests écrits spécialement.

Aucune préparation requise

Comment se préparer à une session MRS ? Lors d’activités quotidiennes, qu’elles soient exercées dans un cadre personnel ou professionnel, chacun développe ses propres habiletés : en rénovant des intérieurs, en jardinant, en réparant un vélo, en jouant à des jeux de société ou en faisant du sport. Les séances exigent de la concentration et de l’attention : « Venez en forme, avec vos lunettes si vous en portez habituellement », conseille Nathalie Fiancette.

Tous les candidats ne se seront bien sûr pas retenus : en moyenne une personne sur deux ayant réussi la séance de tests est embauchée. Mais quelle que soit l’étape où le candidat se retrouve en situation d’échec, il peut bénéficier de la prestation « Rebond » de Pôle emploi. Un psychologue du travail accompagne le candidat pour construire une autre chance d’intégrer le marché de l’emploi : il s’agit d’optimiser leurs candidatures aux offres de postes et à les encourager à demeurer mobilisés dans cette recherche. L’entretien permet de faire un point sur leur carrière, leur motivation et, le cas échéant de leur proposer des formations adaptées à leur profil ou d’envisager une reconversion.

Dans le domaine agricole, sept habilités ont été identifiées. Ce canevas n’est pas immuable. Les techniques, les machines et les organisations évoluent. Les services dédiés de Pôle emploi sont en veille afin d’adapter la méthode aux postes ouverts au recrutement. Les habilités doivent accompagner ces mutations. Concrètement, les employeurs sollicitent les services de Pôle emploi. Par une analyse du poste ou par l’observation, les conseillers Pôle emploi ciblent les habilités qui auraient évolué, définissent les habiletés liées et imaginent les exercices qui permettent de les évaluer. L’ensemble est alors présenté aux employeurs du secteur. Un panel de salariés de l’entreprise se place en situation afin d’apprécier la pertinence des exercices élaborés. C’est la garantie d’être en lien avec le contexte de l’entreprise.

Au regard du nombre de postes à pourvoir dans le secteur, cette méthode de recrutement demeure relativement marginale. Toutefois, son champ d’application ne cesse de s’étendre même si, par exemple, le secteur paysager n’a pas encore été expertisé.

— Renaud de MONTBRON (Tribune Verte 2990)

LES SEPT HABILETÉS DANS LES DOMAINES DE L’AGRICULTURE ET DE L’HORTICULTURE

  • Maintenir son attention dans la durée ;
  • respect des normes et des consignes (avec des exercices pour tester le repérage des formes et des couleurs) ;
  • travailler sous tension ;
  • recueillir et analyser des données ;
  • prendre des initiatives et être autonome ;
  • exécuter des gestes avec dextérité ;
  • se représenter un processus.
    Ces habilités sont évaluées avec des exercices dans des postures contraintes (à genoux ou accroupi) pour coller aux conditions d’exercice du métier. Il est essentiel de vérifier la capacité des demandeurs d’emploi à travailler dans de telles postures.