Responsabilité sociétale des entreprises : Comment la DRH peut-elle contribuer aux engagements RSE ?

Responsabilité sociétale des entreprises : Comment la DRH peut-elle contribuer aux engagements RSE ?

Avec la crise sanitaire et l’urgence du défi climatique, la responsabilité sociétale des entreprises est appelée à prendre une place croissante. La DRH est concernée à plus d’un titre par ces enjeux.

En cette rentrée, la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) fait un retour en force. Les grandes mutations en cours imposées par la crise sanitaire, par la transition écologique ou par la transformation numérique imposent de nouvelles pratiques en matière de bien-être au travail, de mobilité douce, d’employabilité, de management bienveillant ou d’équilibre des temps de vie. Ces nouvelles pratiques incitent les DRH à réfléchir à l’impact social et environnemental de chacune de leurs actions. Dans une approche systémique, ceux-ci doivent appréhender tous le processus RH sous cet angle RSE, y compris sur les sujets traditionnels comme les conditions de travail, la formation, ou la politique salariale, afin de donner une cohérence d’ensemble aux décisions prises.

En 2021, la DRH n’a de toute façon pas d’autre choix que de s’impliquer davantage dans la politique RSE de son entreprise. La RSE constitue non seulement un levier d’attractivité dans une stratégie de marque employeur et d’engagement pour les salariés en poste, mais le cadre réglementaire la contraint à aller dans ce sens.

Depuis la loi Pacte (plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises), les entreprises ont la possibilité de mentionner leur « raison d’être » dans leurs statuts, donnant un sens à leurs activités. Elle prévoit aussi d’attribuer un label aux organisations ayant mis en place une politique d’accessibilité et d’inclusion à l’intention notamment des travailleurs handicapés.

Depuis dix-huit mois, la loi d’orientation des mobilités (LOM) rend obligatoire, pour les entreprises de plus de 50 salariés, de traiter la mobilité durable lors des négociations annuelles avec les partenaires sociaux. Enfin, la loi Climat et résilience prévoit d’élargir la mission du Comité social et économique (CSE) en intégrant une dimension écologique. Ce dernier aura accès à une base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE).

Un grand nombre de leviers à actionner

En matière de données justement, la fonction RH ne part pas de zéro. Elle dispose déjà d’un grand nombre d’indicateurs, dont certains sont précieux pour orienter une politique RSE, comme le taux de personnes handicapées, l’effort de formation, le turn-over, ou le plus récent index d’égalité salariale femmes-hommes. En fonction des priorités définies par la direction générale, la DRH pourra s’en servir pour mesurer les progrès réalisés.

À son niveau, la fonction RH peut actionner un grand nombre de leviers. Du recrutement à la gestion de carrière, en passant par la politique de promotions, elle peut mettre en oeuvre une stratégie en faveur de la diversité et de l’inclusion.

Introduire des critères RSE dans le calcul de la rémunération variable des cadres permet de faire évoluer les pratiques managériales. Le plan annuel de formation peut aussi comprendre un axe RSE, afin de sensibiliser des populations cibles à ces enjeux, comme les acheteurs, mais aussi le personnel RH. Selon une étude de l’ANDRH, 51 % des DRH interrogés disent s’être formés à la RSE en autodidacte par des lectures ou des conférences. Ensuite, il convient de rendre visibles ces actions en communiquant en interne, sans pour autant tomber dans le « RSE washing ». Si un nombre croissant de salariés souhaitent s’investir dans ce type de démarche, notamment au travers du mécénat de compétences, ils montrent une défiance forte à tout ce qui ressemble à un plan de communication dénué d’actions concrètes.

— Xavier BISEUL (Tribune Verte 2974)

Étude : DES SALARIÉS DEMANDEURS DE PLUS DE RSE, MAIS FAIBLEMENT IMPLIQUÉS

Selon le baromètre « Entreprise responsable » d’Ekodev, publié en janvier 2020, 70 % des salariés souhaitent s’impliquer davantage dans la politique RSE de leur entreprise, notamment pour donner plus de sens à leur travail (45 %). Toutefois, près de la moitié des employés (45 %) ignorent ce que fait leur entreprise dans ce domaine, et la confiance accordée aux engagements de leurs employeurs reste fragile (40 %). Une proportion équivalente de salariés (44 %) n’est pas impliquée dans la démarche RSE. Les moyens mis en place pour informer les collaborateurs sont de fait très descendants (newsletters, réunions d’information et affichages, dans 39 % des cas). Pas démotivés pour autant, deux tiers se disent prêts à proposer des initiatives pour nourrir la réflexion.

Avis d’expert : « LA DRH REGARDE LA RSE AVANT TOUT SOUS LE PRISME DE LA MARQUE EMPLOYEUR »

Timothée Quellard, cofondateur du cabinet Ekodev

Quel est le degré d’implication de la DRH dans les engagements RSE ?
Timothée Quellard : Faible. Historiquement, les RH ne sont pas un interlocuteur privilégié pour la RSE. À leur décharge, ils doivent déjà faire face à un grand nombre d’enjeux et de contraintes légales. Les DRH ont été particulièrement sollicités avec la Covid-19. En sortie de crise, ils sont désormais attendus sur ce terrain.

Entre le mouvement des gilets jaunes, la crise sanitaire et les rapports du Giec, il n’est plus possible de faire l’impasse sur les préoccupations sociétales et environnementales. Cela concerne tout le monde et plus seulement les militants utopiques.

Sur quels leviers doit-elle agir ?
T. Q. : Souvent confrontée à des problèmes d’attractivité, la DRH regarde la RSE avant tout sous le prisme de la marque employeur. Le spectre de la RSE est bien plus large, puisque celle-ci aborde la qualité de vie au travail, l’égalité femmes-hommes, ou le mode de management. Il y a une méconnaissance sur ce que recouvre la RSE, et aussi un manque de compétences internes.

Les DRH ont l’impression de bien faire, mais ils n’actionnent pas toujours les vrais leviers. Le mécénat de compétences renforce davantage l’engagement qu’un baby-foot ou qu’une salle de repos. Lors d’un team building, une collecte en commun de déchets sera plus rassembleuse que le traditionnel karting.

Par ailleurs, le DRH doit donner l’exemple. Ce n’est pas en garant le matin sa voiture de fonction sur la place de parking qui lui est réservée qu’il incitera les collaborateurs à s’engager dans la mobilité durable. Ces derniers en ont assez de recevoir des leçons de moral du haut et qui ne sont pas appliquées par leurs dirigeants.

Selon vous, les DRH devraient-ils s’emparer de ce thème de la mobilité durable ?
T. Q. : Il est traité par le petit bout de la lorgnette, en le résumant souvent au télétravail. Il existe pourtant des alternatives à la voiture de fonction, comme le crédit mobilité ou la mise à disposition d’une flotte de vélos en libre-service.

Depuis la crise sanitaire, des salariés ont abandonné les transports en commun pour, entre autres, le vélo, et ils s’attendent à ce que les indemnités qui leur étaient versées pour le métro ou le train leur soient réattribuées sous une autre forme. Pour les employés éligibles au télétravail, il est possible d’identifier les espaces de coworking ou les tiers-lieux accessibles à vingt minutes en vélo de leur domicile.

Enfin, les RH sont à un noeud névralgique des flux d’informations. Ils pourraient consolider l’ensemble des données en matière de mobilité en intégrant les trajets quotidiens des collaborateurs, et les données liées à la flotte de véhicules de société ou aux voyages d’affaires.