Anne Vonbank, responsable expérience collaborateur, Crédit Agricole SA « Faire vivre au collaborateur l’expérience pour laquelle il est venu »

Anne Vonbank, responsable expérience collaborateur, Crédit Agricole SA « Faire vivre au collaborateur l’expérience pour laquelle il est venu »

Il y a trois ans, le groupe Crédit Agricole SA s’est intéressé à l’expérience collaborateur. Ce concept, relativement complexe à appréhender, peut se mettre en oeuvre avec méthodologie dans les entreprises.

Anne Vonbank, vous êtes responsable de l’expérience collaborateur pour le groupe Crédit Agricole SA. En quoi cela consiste-t-il ?
Anne Vonbank : L’expérience collaborateur peut servir à développer l’engagement des collaborateurs, à attirer des talents ou encore à moderniser l’entreprise. Son objectif est de faire vivre au collaborateur de son écosystème (salarié, intérimaire, prestataire, stagiaire…) l’expérience pour laquelle il est venu dans l’entreprise. Il ne faut pas qu’il y ait de dissonance ! Au Royaume-Uni, ce concept existe depuis une dizaine d’années, mais il est présent en France seulement depuis cinq ou six ans. Mon poste a été créé il y a trois ans pour réfléchir à cette notion et pour pouvoir ensuite accompagner les équipes sur ce sujet. Afin de définir l’expérience collaborateur des points de vue du collaborateur et de l’entreprise, nous avons donc mené une grande étude au cours de laquelle nous avons recueilli les meilleures pratiques d’entreprises oeuvrant dans différents secteurs d’activité. Nous les avons ensuite comparées avec notre culture d’entreprise. Selon les sociétés, certaines pratiques peuvent être plus ou moins compatibles. Par exemple, ce n’est pas parce que la mise en place d’un baby-foot a des effets bénéfiques dans une entreprise, que cela fonctionne pour une autre.

Le livre « Au coeur de l’expérience collaborateur » paru en 2021 aux éditions EMS, que vous avez coécrit avec Fabien Vacheret, présente notamment la méthode à suivre pour mettre en oeuvre l’expérience collaborateur. Quelles en sont les principales étapes ?
A. V. : Il s’agit tout d’abord de définir la promesse que l’entreprise fait à ses collaborateurs. Pour cela, il faut que celle-ci sache qui elle est, en acceptant de ne pas être parfaite. Dans un deuxième temps, elle doit définir les segments auxquels elle veut s’adresser : tous les collaborateurs ne sont pas nécessairement des cibles stratégiques. Dans sa politique RH, une entreprise peut ainsi s’intéresser aux « talents », aux nouveaux embauchés… Dans la troisième partie, nous recommandons de déterminer les moments « signature » et de travailler alors sur les points de contacts. Ce sont des moments où le collaborateur va vivre l’expérience sensorielle souhaitée par l’entreprise. Par exemple, si l’expérience du premier contact avec la société est identifiée comme un moment clé, alors il faut travailler tous les premiers points de contact. Ainsi, sur son site Internet, la société peut vouloir emmener le candidat dans un univers qui lui ressemble. Une entreprise du luxe choisira alors un design soigné, avec des images léchées, une musique particulière… La quatrième étape consiste à définir des indicateurs de performance pour mesurer l’efficacité des politiques.

L’expérience collaborateur peut-elle s’appliquer aussi bien à des petites qu’à des grandes entreprises ?
A. V. : Elle concerne tout le monde. Que vous le vouliez ou non, elle existe. Il faut donc faire attention aux dissonances. Quand l’expérience est déceptive, le collaborateur peut choisir de quitter la société. Or, un recrutement coûte cher. Et le pire scénario, c’est lorsqu’un salarié reste dans l’entreprise alors qu’il est déçu. Il ne faut pas oublier non plus que l’expérience collaborateur est évolutive. Prenez, par exemple, un salarié qui devient parent : ses attentes dans son travail évoluent. L’expérience collaborateur demande donc au responsable RH d’avoir une vision holistique, de devenir en quelque sorte un urbaniste ou un architecte, qui conçoit celle-ci avec méthodologie. Elle doit être synonyme d’enchantement pour le collaborateur, cela va au-delà de la simple satisfaction.

— Propos recueillis par Caroline EVEN (Tribune Verte 2982)