Autant de formations dispensées en 2020 qu'en 2015, mais autrement

Autant de formations dispensées en 2020 qu'en 2015, mais autrement

La récente étude du Céreq intitulée « Comment les entreprises ont-elles formé en 2020 ? » analyse l’impact de la crise sanitaire de la Covid-19 sur l’effort des organisations en matière de formation et les modalités des sessions proposées aux salariés. Si l’enquête n’est pas nouvelle, son champ élargi permet la collecte d’informations plus fines sur les petites entreprises et sur des secteurs autrefois exclus. Agnès Checcaglini, ingénieure de recherche, revient sur les leçons à en tirer.

Tous les cinq ans, cette enquête est élaborée et coordonnée par Eurostat auprès de l’ensemble des entreprises des États membres de l’Union européenne. Mais si cette toile de fond continentale pose un cadre réglementaire, rien n’interdit aux pays concernés d’étendre le champ de l’enquête pour recueillir davantage de données. C’est le choix de la France.

Des disparités entre entreprises

Réalisée par le Céreq et coconstruite avec la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) et France compétences, l’enquête « formation-employeur européenne » fournit des résultats issus d’un travail mené en 2020 auprès des organisations françaises. Obligatoire, l’étude s’adresse aux structures de plus de dix salariés du secteur privé, hormis celles relevant de l’agriculture, de la santé et de l’éducation. La version française, elle, va donc plus loin. « L’annualisation et l’extension de l’enquête répondent à une demande institutionnelle et sociale puisque, depuis 2014, il n’y a plus d’obligation pour les entreprises de financer la formation professionnelle », justifie Agnès Checcaglini, ingénieure de recherche. Désormais, les partenaires sociaux et l’État auront une connaissance fine des relations entre les entreprises et les opérateurs de compétences (OPCO). Pour y parvenir, « toutes les entreprises du secteur privé sont destinataires du questionnaire », poursuit la coauteure de l’étude.

À l’arrivée, le document met en évidence les disparités entre les entreprises, selon leur taille et leur domaine d’activité. Les petites structures forment moins régulièrement et moins intensément leurs salariés que ne le font les organisations plus importantes. « Dans une grande entreprise, plusieurs personnes peuvent occuper un même poste. En formant ces salariés par rotation, la continuité du service ou de l’entreprise n’est pas compromise. Dans une petite entreprise, un seul salarié absent peut déstabiliser l’entité », explique l’ingénieure de recherche. Toutes tailles confondues, les entreprises des secteurs de l’hébergement, de la restauration ou de l’agriculture affichent des taux d’accès à la formation très faibles. En cause, notamment : la surreprésentation des collaborateurs peu qualifiés dans ces branches.

La formation ne connaît pas la crise

Autre enseignement : malgré la crise, les entreprises de dix salariés et plus ont maintenu leur niveau de financement de la formation professionnelle continue en 2020, mais elles ont adapté leurs pratiques en privilégiant les modules à distance, l’autoformation et les sessions en situation de travail. « Certaines entreprises ont bénéficié de l’accompagnement des opérateurs de compétences, des branches  professionnelles et des services de l’État pour mobiliser des dispositifs d’aide à la formation, notamment lorsqu’il y avait du chômage partiel dans les effectifs », remarque Agnès Checcaglini. Ce changement de nature des formations est-il dû uniquement à la Covid ? Ou est-il d’ordre plus structurel ? « Difficile de trancher en l’état. Les prochaines études nous le diront », répond-elle. D’ici la prochaine enquête européenne en 2025, les entreprises françaises seront interrogées chaque année « sur quelques indicateurs quantitatifs et stratégiques », précise Agnès Checcaglini. De quoi affiner encore le diagnostic.

— Renaud DE MONTBRON (Tribune Verte 3019)