Cultures L’itinéraire technique, un levier contre le changement climatique

Cultures L’itinéraire technique, un levier contre le changement climatique

L’adaptation de l’itinéraire technique fait partie des leviers permettant de réduire la sensibilité des cultures aux conséquences du dérèglement climatique. En tant qu’organisme de recherche appliquée, Arvalis-Institut du végétal acquiert et diffuse des références afin de faire face aux risques.

La gestion de l’eau et des sols, une possible remontée des zones de production vers le nord et des difficultés potentielles de production dans le Sud pour certaines cultures, une fragilisation de certains systèmes… L’agriculture doit relever de nombreux défis face au changement climatique. Afin de réduire la sensibilité des cultures aux conséquences de ce dérèglement du climat, l’une des solutions consiste à adapter les itinéraires techniques. « L’itinéraire technique est un enchaînement logique et ordonné d’interventions techniques culturales permettant de tirer le maximum des potentialités du milieu vis-à-vis d’une production donnée, du semis la récolte. Chaque intervention va dépendre à la fois de ce que l’agriculteur a opéré précédemment et de l’état du milieu (de la parcelle) au moment où il intervient, explique François Laurent, directeur recherche et développement chez Arvalis-Institut du végétal. Le changement climatique entraîne des perturbations (stress thermiques, déficit hydrique ou excès d’eau…) qui nécessitent d’adapter les itinéraires techniques pour maintenir les performances et la rentabilité des systèmes de production. »

Décalage de la date de semis, choix de la variété…

L’adaptation de l’itinéraire technique peut passer par une solution de plus en plus répandue qui consiste à décaler la date de semis. « Cette méthode permet de positionner le déroulement du calendrier cultural de manière à ce que les phases sensibles du cycle de la culture ne correspondent pas à un risque climatique (tel que l’excès thermique en fin de cycle, le gel et le déficit hydrique en période printanière, l’excès d’eau en hiver) et d’éviter les accidents. » Concrètement, avancer la date de semis d’une culture d’hiver (blé par exemple) permettra de récolter plus tôt et d’éviter le déficit hydrique de fin de cycle. Retarder la date de semis peut être utile pour minimiser les risques vis-à-vis de certains ravageurs, eux-mêmes impactés par le réchauffement climatique.

Autre levier : le choix de variétés moins sensibles aux stress, plus adaptées aux nouvelles conditions. « Chaque variété a ses exigences en matière de températures. En connaissant les caractéristiques des variétés, on peut par exemple définir la date optimale de semis et ainsi éviter le stress de fin de cycle et le stress thermique », indique François Laurent. L’irrigation fait aussi partie des solutions potentielles. « En cas de stress hydrique, ce levier est intéressant pour certaines cultures de printemps (maïs par exemple) et particulièrement efficace. À condition de positionner au mieux les périodes d’irrigation en fonction des périodes de sensibilité, différentes selon les types de variétés. » Enfin, des actions de recomposition des rotations et d’introduction de nouvelles cultures peuvent être mises en oeuvre. Grâce à la capacité de certaines espèces à économiser ou à bien exploiter les réserves en eau, la modification de l’assolement (panier des espèces cultivées sur l’exploitation) fait partie des options possibles lorsque l’on souhaite conduire une stratégie d’esquive climatique. « Des outils informatiques comme Asalee permettent un calcul technico-économique de ces options en prenant en compte les aléas du climat et des prix, car la sanction finale reste l’économie », insiste François Laurent.

Des références pour faire face aux risques

« Notre rôle, en tant qu’organisme de recherche appliquée, est d’acquérir et de diffuser des références – techniques, agronomiques ou économiques – qui permettent de faire face aux risques accrus liés au changement climatiques », explique François Laurent. Les travaux de l’institut, notamment avec la plateforme Phénofield, se tournent vers l’évaluation de la tolérance à la sécheresse des variétés. « Le but est d’évaluer la capacité de ces variétés à supporter différents niveaux de stress hydrique et ainsi identifier les meilleures génétiques. » Arvalis travaille aussi sur l’effet du décalage de la date de semis sur les variétés, et sur l’adaptation des outils permettant d’accompagner la culture dont le calendrier a été modifié. L’institut met ainsi au point des techniques de déclenchement d’apports d’engrais azotés qui prennent en compte le risque climatique. Ces activités au sein de l’institut font appel à des nombreuses compétences. « É cophysiologistes, agronomes, pathologistes, spécialistes de la data… tous nos métiers sont impliqués dans la mise au point de techniques permettant de s’adapter au changement climatique », conclut François Laurent.

—— Danielle BOBIOU (Tribune Verte 2960)