Jérôme Volle, président de la commission emploi de la FNSEA « Le vrai sujet est celui de l’attractivité »
Confrontée à des problématiques de recrutement, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) cherche à attirer un nouveau public au sein de ses entreprises agricoles. Elle met en avant la diversité de ses métiers et leur montée en compétences.
L’attractivité des métiers et la politique de recrutement dans des entreprises agricoles font partie des sujets majeurs traités par la commission emploi de la FNSEA. Pour quelles raisons ?
Jérôme Volle : Depuis un certain nombre d’années, nous rencontrons des difficultés à recruter, mais le phénomène s’amplifie ces 25 dernières années. La période liée à la crise de la Covid-19 n’a rien arrangé. Les chefs d’exploitation, qui se tournent vers une main-d’oeuvre étrangère pour pallier le manque d’effectif, font face également à de plus grandes difficultés pour la faire venir. Pérenniser la main-d’oeuvre en production et en transformation (dans les abattoirs, les usines…) représente donc un enjeu majeur.
Ces problématiques s’accentuent-elles avec les nouvelles générations qui arrivent sur le marché du travail ?
J.V. : Une étude montre que le secteur agricole est méconnu du monde urbain, or les populations restent urbaines. Et lorsqu’elles recherchent un emploi, elles ne choisissent pas l’agriculture qui leur semble très éloignée. Elles ne savent pas qu’il existe pourtant des métiers d’excellence et que nous avons de plus en plus besoin de techniciens, d’agents de maîtrise, voire de cadres. Nous cherchons en effet aujourd’hui des salariés avec des compétences en management, qui pourront encadrer, gérer les ateliers (porcins, laitiers…), entre autres. Pour rendre notre secteur attractif et pour valoriser nos métiers, nous communiquons au niveau national sur les réseaux sociaux, comme TikTok. Nous travaillons également avec le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation sur la campagne de communication « L’Aventure du vivant ». Dans les territoires, des opérations s’appuient sur les Salons.
S’agissant de la Convention collective nationale de la production agricole et Cuma, entrée en vigueur le 1er avril dernier et comprenant notamment une grille de classification des salariés agricoles, elle devrait, de son côté, donner une nouvelle impulsion aux évolutions professionnelles dans notre branche.
Les entreprises agricoles peuventelles répondre aux attentes des jeunes générations, souvent définies comme ultra-connectées, en quête de sens dans leur travail et d’un équilibre entre vies personnelle et professionnelle ?
J.V. : Sur la question du numérique, une grande partie des tracteurs et du matériel y est d’ores et déjà passée. Les entreprises s’appuient également sur des outils d’aide à la décision pour analyser, surveiller, faire les bons choix… Quant à la quête de sens, le monde agricole répond aux enjeux de souveraineté alimentaire. Nos métiers travaillent avec le vivant, les saisons, tout ce qui est « noble ». Nous mettons en avant ces valeurs dans nos messages, mais nous ne pouvons pas tromper le récepteur. Il faut être réaliste. Travailler dans une entreprise agricole est passionnant, mais aussi exigeant, notamment en matière de temps de travail, même si nous prenons aussi des congés. S’agissant du télétravail, dans nos entreprises, ce modèle est limité à quelques fonctions. Nous avons besoin de la main-d’oeuvre sur place.
Aujourd’hui, les vrais sujets pour la FNSEA sont bien ceux de l’attractivité et de l’accessibilité. De nombreuses personnes pensent que ce secteur n’est pas fait pour elles, car elles ne sont pas issues du monde agricole. Or, nous avons besoin de ce public. Avec leurs visions différentes, celles-ci apporteront de la valeur ajoutée et pourront s’épanouir ! Avec la diversité des métiers, chacun peut trouver sa place et construire son propre itinéraire à l’aide notamment des formations.
— Propos recueillis par Caroline EVEN (Tribune Verte 2982)