La dématérialisation, l’une des priorités du DRH en sortie de crise?
Entre autres enseignements, la crise du Covid-19 aura rappelé l’importance de dématérialiser les process RH. Placées comme les autres fonctions support en télétravail durant le confinement, les DRH, qui avaient sauté le pas de la numérisation, ont pu accéder à distance à tous leurs documents.
Si le bulletin de paie a été le premier process RH à être dématérialisé, suivi par le contrat de travail, c’est l’ensemble du dossier collaborateur qui peut basculer en version électronique. Les arrêts de travail, les demandes de formation, les évaluations annuelles, les demandes de congés ou encore les notes de frais sont, eux aussi, éligibles à la dématérialisation. De fait, la DRH est, en général, la direction qui consomme le plus de papier. Une politique zéro papier lui permet de réduire à la fois ses dépenses de fonctionnement – les impressions, la mise sous pli, les envois postaux et les coûts de stockage – ainsi que son empreinte carbone. Elle libère, par ailleurs, ses équipes d’un travail d’édition fastidieux et chronophage et élimine les erreurs liées aux saisies manuelles.
Accessibilité, traçabilité et confidentialité
Cette politique permet également à l’entreprise d’améliorer son image employeur. La dématérialisation des procédures RH a, en effet, la côte auprès des salariés français (lire notre encadré page précédente). Un coffre-fort électronique permet à un employé de stocker ses documents personnels comme les factures de téléphone ou d’électricité. En le reliant à son compte personnel d’activité (CPA), il peut ainsi conserver la totalité des fiches de paie émises par ses différents employeurs. Le cadre réglementaire incite également à cette numérisation. Depuis la loi travail El Khomri de 2017, le passage du bulletin de salaire au format électronique se fait par défaut. C’est au salarié refusant la fin du support papier de manifester son opposition. En contrepartie, l’employeur doit garantir la disponibilité des documents soit pendant une durée de 50 ans, soit jusqu’à l’âge de 75 ans du salarié concerné.
La dématérialisation présente d’autres atouts. Associée à une solution de gestion électronique de documents (GED), elle permet de retrouver les documents indexés depuis un simple moteur de recherche et, ce, quel que soit le terminal, PC, tablette ou Smartphone.
Par ailleurs, l’horodatage et la signature électronique certifiée (eIDAS, RGS…) garantissent l’intégrité des documents. En assurant la traçabilité des process – qui a accédé à quel document et quand – une solution de dématérialisation peut fournir des preuves en cas de contentieux. En matière de confidentialité des données, il est conseillé de privilégier les acteurs français qui hébergent leurs données sur le territoire national ou tout du moins européen. Selon le principe d’extraterritorialité propre au droit des États-Unis, le Cloud Act contraint les prestataires américains à divulguer les données de leurs utilisateurs dans le cadre d’enquêtes judiciaires, même si celles-ci ne sont pas stockées aux États-Unis.
—— Xavier BISEUL (Tribune Verte 2939)
Avis d’expert : « DIVISER PAR QUATRE LE COÛT DE DIFFUSION D’UN BULLETIN »
Thierry Imbert, directeur qualité de Zeendoc
Quels sont les freins à la dématérialisation ?
Ils ne viennent pas des salariés. Huit collaborateurs sur dix sont en accord avec ce principe. Du côté des employeurs, les obstacles sont davantage organisationnels ou psychologiques. Pour certains, la valeur du papier reste plus forte que le format électronique. Cela est paradoxal, puisque les documents sont dorénavant nativement numériques. La version papier n’en est donc que la copie ! Il y a aussi une méconnaissance du marché de la dématérialisation. Si les solutions étaient par le passé réservées aux grands comptes, elles sont aujourd’hui accessibles aux TPE-PME avec un retour sur investissement quasi immédiat.
Quels sont les processus RH « dématérialisables » ?
Les entreprises commencent par le bulletin de paie dont le coût de diffusion est divisé par quatre. Le contrat de travail vient ensuite, surtout de la part d’entreprises qui emploient beaucoup de CDD ou de saisonniers comme dans l’agriculture. Le contrat est signé par les deux parties sans déplacements inutiles. Cela donne une image positive et moderne de l’employeur. Dans le contexte actuel de guerre des talents, il peut aussi « verrouiller » rapidement une embauche.
Viennent ensuite la pose des congés et le traitement des notes de frais qui suivent un circuit d’approbation avec la validation du N + 1. Le numérique facilite grandement les choses. Il suffit au collaborateur de prendre la facture en photo avec son Smartphone. Les reçus sont ainsi saisis au fil de l’eau, et l’employé peut les visualiser à la fin du mois dans un tableau de synthèse. Une fois validées, les notes de frais vont être directement intégrées dans le logiciel comptable, sans saisie manuelle.
Quels sont les gains pour l’employeur ?
Outre les économies réalisées, la dématérialisation supprime les mètres carrés consacrés au stockage des documents papier. Elle fait aussi gagner du temps aux équipes RH qui ont d’autres tâches à remplir que de faire du pliage et de la mise sous pli. Le traitement manuel d’une centaine de bulletins revient à cinq heures de travail par mois. Il suffit là de cliquer pour déposer les bulletins dans les coffres-forts électroniques des salariés ou de les envoyer par La Poste par le biais d‘une société d’éditique.
Par ailleurs, la dématérialisation garantit la conformité au RGPD. Le logiciel va alerter l’employeur sur la fin de délai de conservation de certains documents qu’il convient de supprimer. Paramétrables, les notifications peuvent porter sur les fins de période d’essai ou de CDD. Autre atout : l’accessibilité des documents. Il devient très facile de les retrouver. Un moteur de recherche permet de faire des requêtes multicritères ou plein texte. Il est, par exemple, possible de chercher la liste des achats de fournitures de bureau d’un collaborateur sur une période donnée. La GED peut aussi servir de CVthèque pour retrouver tous les développeurs qui maîtrisent le langage Java.