- Grandes cultures

Le miscanthus maintient le tissu industriel

Le miscanthus maintient le tissu industriel

Le miscanthus est bien connu pour alimenter les chaudières biomasse et pour son utilisation comme paillis. En Seine-et-Marne, les agriculteurs à l’initiative du projet Polybiom développent de nouveaux débouchés pour une meilleure valorisation de la culture.

«Lorsque nous avons lancé le projet en 2007, l’objectif était de valoriser la tonne de miscanthus à hauteur de 100 euros, se souvient Xavier Vénard, agriculteur et actionnaire de la SAS Polybiom. Nous n’avons pas encore atteint ce niveau de rémunération, mais nous pensons y parvenir d’ici un ou deux ans ! » Comme beaucoup de projets agricoles qui ont porté sur le miscanthus, la première destination des récoltes est énergétique. En 2007, l’association de loi 1901 Biomasse environnement système (BES) est créée avec une quarantaine d’agriculteurs membres. Cinq agriculteurs créent ensuite une société éponyme pour commercialiser la production des agriculteurs.

Aujourd’hui, « 60 % du volume de miscanthus produit sont destinés à des unités de chauffage biomasse, détaille Xavier Vénard. Avec notamment un contrat conséquent de 600 t/an à fournir à la  commune de Montereau ». Si les débouchés sont assurés par la production d’énergie, il est difficile d’atteindre les objectifs de rémunération uniquement par ce biais.

Des partenaires hétéroclites

La collectivité locale de Moret Seine & Loing fait partie des instigateurs du projet de diversification. Si sa présence peut surprendre au premier abord, elle fait sens après quelques explications du directeur de la société d’économie mixte MSL-SEM, Olivier Suty : « Entre 2000 et 2007, la collectivité locale a fait face à la fermeture de trois grandes industries, engendrant la suppression de 5 000 emplois dans le secteur. Si le but n’est pas de compenser la totalité de ces plans sociaux, la volonté politique est de maintenir, voire de reconstruire, un tissu industriel et économique sur des secteurs d’activité porteurs. Nous soupçonnions alors que l’environnement et les matériaux biosourcés pourraient être un bon cheval de bataille. Notre territoire étant composé aux deux tiers de communes rurales, il nous semblait nécessaire d’y intégrer des agriculteurs afin de maintenir notre tissu agricole. » C’est dans ce contexte que sont recherchés de nouveaux débouchés pour le miscanthus. Dès 2010, les équipes du projet se rapprochent de l’université de Picardie Jules-Verne pour étudier les biocomposants et les biomatériaux. En découle le dépôt d’un premier brevet pour une résine en 2015, puis la création de la SAS Polybiom en 2017, afin de commercialiser le résultat des recherches.

Une première ligne de production créatrice d’emplois

Pour que la capacité de Polybiom à commercialiser ses produits issus du miscanthus soit totale, une première usine, d’une capacité de production de 300 t, est construite sur la commune de Moret-Loing-et-Orvanne. Elle représente un investissement de 1,2 million d’euros. Achevée en septembre 2021, la chaîne de production fonctionne depuis le second semestre 2022. « Il faut percevoir cette première unité de production comme un prototype, indique Xavier Vénard. Tout ce qui est produit aujourd’hui au sein de l’usine est destiné à la réalisation de tests pour nos potentiels futurs clients. Il s’agit d’une étape indispensable pour être crédibles auprès de nos prospects en leur prouvant notre capacité à passer de l’échelle laboratoire à celle de démonstrateur industriel. Même si nous avons la place dans nos nouveaux bâtiments pour doubler la production de manière très rapide, cela ne suffira pas à fournir le marché une fois que nous serons en phase de production industrielle. » Si les agriculteurs actionnaires de Polybiom semblent aussi confiants, c’est en grande partie grâce aux nouvelles normes et obligations applicables depuis janvier 2020, particulièrement la directive européenne du 5 juin 2019, qui implique la suppression prochaine de la très grande majorité des plastiques à usage unique, traduite en France en partie par une loi applicable depuis le 1er janvier 2020.

— Mathieu LECOURTIER (Tribune Verte 3013)

SAS Polybiom : L’ASSOCIATION D’AGRICULTEURS, DE CHERCHEURS ET D’UNE COLLECTIVITÉ LOCALE

La SAS Polybiom a été créée fin 2017 pour concrétiser un projet qui a débuté dix ans plus tôt. Son capital est réparti entre trois typologies d’actionnaires :

  • trois agriculteurs d’abord, à raison de 21 % pour Patrick Billard, 21 % pour Éric Severin et 21 % pour Xavier Vénard. Tous les trois font partie de l’aventure miscanthus depuis le début ;
  • une collectivité locale, au travers d’une société d’économie mixte. La collectivité locale de Moret Seine & Loing détient, elle aussi, 21 % par le biais de la société MSL-SEM ;
  • deux chercheurs qui participent au projet de valorisation du miscanthus depuis le début : Michèle T’Kint à hauteur de 12 % et Justin Houessou à 4 %.

Catalogue : DÉJÀ SEPT PRODUITS À LA GAMME

À ce jour, la SAS Polybiom propose sept produits :

  • 2 colles, Polycot et Polystic, dont l’objectif est de remplacer les colles d’assemblage fabriquées à base de pétrochimie ;
  • 1 vernis, Polygcc, avec pour objectif de se substituer aussi aux produits de la pétrochimie, permettant d’améliorer l’esthétique de produits commerciaux et de rendre des tissus imperméables ;
  • 4 résines. Polyjec qui est destinée à la fabrication d’objets par injection, Polygine et Polyplak qui visent le marché de la thermocompression, et Polymisc davantage destiné à la stratification.

Si tous les produits fabriqués par Polybiom sont composés avec du miscanthus, il n’est pas le seul composant. Cela étant dit, la totalité des ingrédients sont biosourcés et les produits fabriqués par Polybiom sont biodégradables selon la ligne directrice OCDE 301 A. Les produits Polybiom peuvent tous être compostés dans un compost domestique.